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LES RESPONSABILITÉS DE LA GUERRE

LES INTRIGUES ALLEMANDES
AU MAROC
(1905-1914)

Lorsqu’après l’assassinat du docteur Mauchamps à Marrakech, en mars 1907, et après le meurtre de cinq ouvriers français du port de Casablanca en juillet de la même année, la France décida d’occuper Oudjda, puis d’opérer à Casablanca un débarquement pour protéger la vie de ses nationaux, il régnait dans l’Empire du Maroc une anarchie complète. Par un singulier paradoxe, cette anarchie voisinait avec un régime féodal fondé sur l’autorité absolue de chacun des grands seigneurs qui se partageaient le pouvoir et le contrôle des différentes régions de ce vieux pays. Le Sultan ne jouissait en réalité que des prérogatives précaires et limitées de chef religieux de l’Islam occidental. Son autorité temporelle ne dépassait guère la région de Fez, d’où il ne sortait que rarement, escorté d’une armée imposante, en prévision d’un coup de main, toujours possible, de l’un des nombreux prétendants à la suprématie. Il vivait des impôts levés les armes à la main, et son titre de Sultan ne lui valait qu’un respect illusoire. Telle était la situation du Maroc à cette époque ; c’était à peu près celle de la France à l’avènement de Louis XI.

Un pareil état de choses était éminemment propice aux