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le caractère politique, ni sur mes opinions. Mon plan de pouvoir, mes idées sont saines et justes, je le crois du moins. Elles comportent beaucoup plus des vôtres que vous ne le pensez. Seulement, je prends une route que je crois plus sûre pour arriver à un bon résultat. Vous ne voyez qu’une partie des intérêts, des choses, des personnes et des mœurs. Je crois voir tout et pouvoir tout combiner pour un état politique prospère. Jamais je ne me vendrai. Je serai toujours, dans ma ligne, noble et généreux. La destruction de toute noblesse hors la Chambre des pairs ; la séparation du clergé d’avec Rome ; les limites naturelles de la France ; l’égalité parfaite de la classe moyenne ; la reconnaissance des supériorités réelles, l’économie des dépenses, l’augmentation des recettes par une meilleure entente de l’impôt, l’instruction pour tous, voilà les principaux points de ma politique, auxquels vous me trouverez fidèle. Il y aura cohésion entre mes paroles et mes actions.

« Quant aux moyens, j’en suis juge. Je me soumets à toutes les calomnies, je me suis préparé à tout, parce qu’un jour il y aura des voix pour moi. Je veux le pouvoir fort. Vous pourrez ne pas approuver ou ne pas comprendre tout d’abord mes idées, mes moyens ; mais vous m’estimerez et m’aimerez toujours, parce que je sais n’être corruptible ni par l’argent, ni par une femme, ni par un hochet, ni par le pouvoir, parce que je le veux entier. Vous pouvez compter là-dessus. Je vois toujours toute ma vie et mets mon estime à plus haut prix que tout.

« Cela dit, ne cherchez plus à me chicaner sur mes opinions. L’ensemble est arrêté. Quant aux détails de ma vie, ou à des améliorations d’exécution, votre amitié sera toujours souveraine, bien écoutée, avec délices. Je vous parle à cœur ouvert, parce que je. sais que vous respecterez les secrets de ma pensée politique ; elle est de nature à me vouer à la haine de mon parti, s’il la connaissait. Mais il est impossible de la faire triompher sans la coopération, sans la conviction des chefs. Je ne le trompe pas. Je crois que son existence est liée à la reconnaissance sans arrière-pensée des choses voulues par la nature des idées du siècle. »

Il reste d’ailleurs bien convenu que Balzac se présentera à Angoulême s’il y a des chances de succès. Que Mme Carraud fasse lire autour d’elle le Médecin de campagne : cet écrit bienfaisant, digne du prix Montyon, est de nature à faire bonne propagande. Le commandant Carraud peut aussi servir aux projets politiques de Balzac en lui réservant toutes ses idées d’améliorations que Balzac, coordonnera dans son système. Quant aux reproches de prodigalité, Mme Carraud les exagère :

« Vous avez fait des monstres de mes jeux d’imagination. On doit accepter les malheurs aussi bien que les avantages d’une faculté. Je