plaie vous est dévolue, comme pour achever l’éducation de votre âme, supportez-la avec courage ; et avec courage aussi, et persévérance, travaillez à la fermer. Plus de dépenses superflues. Venez ici, et, à Paris, économisez ; reposez-vous sur mon amitié, qui saura me rendre active pour vous libérer de tous soucis matériels, et qui partagera ceux qu’elle ne pourra vous épargner. Adieu ; voulant vous répondre le jour même où j’ai reçu votre lettre, je ne puis le faire comme je l’aurais voulu ; mais si vous comprenez que je vous attends, sans pourtant vouloir mettre d’enjeu à la partie de billard, ma lettre sera assez claire. Apportez tout votre linge qui a besoin de réparation, je vous le ferai mettre en ordre. Usez-en comme le fera Ivan un jour ; je compte assez sur vous pour cela.
Carraud vous est tout dévoué ; pourquoi sommes-nous en position aussi médiocre ?...
Moi, si vous le voulez, je vous embrasse.
Balzac accepte sur le champ et répond de la Bouleaunière :
Que de reconnaissance je vous ai vouée en lisant votre bonne et affectueuse lettre, sur laquelle je comptais d’ailleurs avec la foi de La Fontaine allant chez Mme d’Hervart [1] ! Oui, j’irai à Angoulême, et près de vous pour deux bons mois. Mais je n’y puis pas être avant le 1er décembre. Le changement de climat si brusquement fait m’a donné un gros rhume de poitrine, et je me sens assez malade pour ne pas me mettre en route. Je resterai ici pour le guérir : puis j’irai à vous.
Mes chagrins ne sont nullement pécuniaires, car jamais je ne me suis trouvé plus riche par ma plume. Mais je vous remercie de cœur de tout ce que vous m’écrivez à ce sujet. Quant à mes petites affaires de garçon dont vous vous occupez d’une manière si touchante, j’ai l’habitude, extrêmement artiste, et le système arrêté de remplacer par le neuf la moindre chose attaquée, ce qui fait toujours frissonner ma mère, et toute bonne femme de ménage.
Mais j’accepte avec une poignée de main pleine d’amitié, de bons sentiments, de vraie et durable affection, l’offre d’Auguste.
- ↑ La Fontaine, après la mort de Mme de la Sablière, rencontre, rue Saint-Honoré, M. d’Hervart qui venait lui offrir l’hospitalité dans son hôtel de la rue de la Plâtrière : « J’y allais, » répondit le Bonhomme.