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porte aujourd’hui la controverse qui nous intéresse, on ne s’en occupa guère avant William Herschel. Les plus brillantes avaient été observées longtemps avant l’époque de Messier. Mais cet infatigable observateur qui mérita, avant mon savant collègue Giacobini, le surnom de « furet des comètes, » découvrit une soixantaine de nébuleuses et amas nouveaux, et son catalogue figure dans la Connaissance des Temps de 1783 et 1784.

A la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe, les deux Herschel, munis de leurs puissants télescopes, portèrent à plus de 4 000 le nombre des nébuleuses observées dans les deux hémisphères célestes, vingt fois plus qu’on n’en connaissait avant. Depuis, le nombre des nébuleuses repérées s’est encore considérablement accru, soit par l’astrophotographie, soit par l’observation purement visuelle, qui entre les mains d’astronomes comme M. Bigourdan, — muni cependant d’un instrument médiocre et opérant dans le ciel, prétendument défavorable et en réalité excellent de Paris, — a récemment encore accru beaucoup la liste déjà longue de ces astres singuliers.

Kant parait avoir été le premier à imaginer que des Voies lactées, semblables à la nôtre, peuvent exister très loin d’elle. Mais si du domaine de la spéculation pure, nous passons à celui de l’observation, — le seul qui intéresse vraiment une science bien faite, — c’est William Herschel, qui a sans doute le mérite d’avoir le premier suggéré la théorie, selon laquelle notre univers lacté n’est qu’une île de l’océan spatial, dans lequel, et très loin, d’autres îles stellaires, — les nébuleuses non résolubles qu’on observe au télescope, — sont des mondes analogues à celui dont fait partie notre soleil. De là le nom de « théorie des Univers-Iles » (Island Universe Theory), qui a été donné à cette conception cosmologique.

Herschel avait en effet remarqué qu’à côté des amas serrés d’étoiles dont ses instruments séparaient, distinguaient, résolvaient les composantes, d’autres nébuleuses n’étaient pas résolubles. Il les considéra comme des amas d’étoiles que seules leurs distances énormes rendaient indiscernables, et que des instruments beaucoup plus puissants devraient résoudre quelque jour. C’étaient pour lui des groupements stellaires qui, vu leur diamètre apparent notable combiné avec leurs distances supposées, devaient être aussi importants, aussi vastes que notre Voie lactée tout entière.

Lord Ross un peu plus tard, avec son télescope de six pieds d’ouverture, examina un grand nombre de nébuleuses et crut observer en beaucoup d’entre elles des signes de résolution.