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quand nous le remettons entre les mains compétentes, mais devra redescendre à Lima le soir même. Tel est le « Sorrotché, » le mal des montagnes, dont les habitants du pays ne sont pas exempts ; aussi franchissent-ils d’ordinaire la Cordillère en deux ou trois étapes, afin de s’acclimater progressivement, et nous avons eu tort de ne pas les imiter.


Nous sommes dans le bassin de l’Amazone, sur le versant de l’Atlantique, dans la Puna, la zone déserte et désolée que dominent les neiges éternelles, et toute trace de végétation a disparu. Maintenant nous voici dans le tunnel de la Galera, de 2 kilomètres 400 de longueur, au point culminant de la ligne ferrée : 4 775 mètres d’altitude ; c’est presque la hauteur du Mont Blanc (4 810 m). A la sortie du tunnel, une station me permet de descendre pour mieux contempler l’étrange paysage. Le ciel s’est voilé, la température a fraîchi. L’eau de fusion qui descend des glaciers a formé quelques étangs ; des troupeaux de lamas s’y abreuvent ou pâturent sur leur bord une herbe rare.

Nous descendons à la station de la Oroya, à 225 kilomètres, par 3 712 mètres d’altitude.

Ce chemin de fer transandin, qui représente un magnifique effort, a été construit par l’ingénieur américain Meiggs, pour le compte de l’État péruvien. Commencé en 1870, il a été interrompu de 1876 à 1888 par le manque de crédits, et il a coûté un million le kilomètre.

Une double bifurcation de la voie ferrée, qui se prolonge à la fois vers le Nord jusqu’à Cerro de Pasco et vers le Sud jusqu’à Huancayo, des usines, des mines donnent beaucoup de mouvement à ce centre de la Oroya où l’on retrouve quelques arbres. Le préfet péruvien de Cerro de Pasco nous y attend ; il nous présente le sous-préfet et l’alcade de la Oroya, tous deux Américains du Nord ; le préfet voudrait nous conduire dans le chef-lieu de son département, où nous trouverions une ville très prospère dont le développement récent est d’un très grand intérêt. Toutes les entreprises minières sont entre les mains américaines de la Cerro de Pasco Mining Company, et la découverte de gisements houillers, en permettant de traiter les métaux sur place, vient de donner une vaste extension à ses opérations, extrêmement productives en cuivre et en argent.