de son peuple, de ses sympathies et de ses antipathies, de ses intérêts et de ses aspirations, économiques aussi bien que politiques. Avec cela, une plume alerte et incisive, une éloquence naturelle, entraînante, qui s’adresse à la fois à la raison et au sentiment... Or, de sentiment, il n’y en a pas de plus vif, chez les Rhénans, que la haine du Prussien et, mieux encore, la profonde défiance des prétendus Allemands de l’Est, « de ces Slaves mal germanisés qui se mêlent de régenter les descendants de la noble nation franque... »
Le portrait était exact. Je n’y ajoute quelques traits que pour constater que je me suis trouvé, cet après-midi du samedi 16 décembre, en face d’un jeune homme de trente à trente-cinq ans, de physionomie sympathique, de regard droit et net, qui dit bien ce qu’il veut dire, sans détours, sans réticences et qui, d’entrée de jeu, nous demande en souriant : « Eh bien ! pouvons-nous espérer que la France nous soutiendra ? »
La France ! Nous n’avons, nous, aucune qualité pour parler en son nom ; et il le sait bien, au demeurant. Nous disons seulement notre effort, les luttes que nous avons soutenues depuis huit ans pour le triomphe de notre cause, qui est justement celle de Smeets et de Dorten, — l’autonomie rhénane, — mais plutôt celle de Smeets, qui n’ajoute pas, lui, « dans le cadre de l’Allemagne. »
Lejeune chef de parti reconnaît la valeur de notre aide ; il reconnaît aussi que, depuis quelque temps, l’opinion française, engourdie jusque-là, semble s’émouvoir à la pensée qu’il y a ici, tout le long du Rhin, des populations qui ne nous sont aucunement hostiles ; qui, bien au contraire, s’étonnent que nous n’ayons pas repris la politique séculaire qui les défendait contre les empiétements et la mainmise des « gens de l’Est ; » des populations qu’effraie singulièrement, à l’heure présente, la catastrophe financière dont l’Allemagne est menacée, la catastrophe politique, aussi, — car ils sont convaincus que la première entraînera fatalement la seconde et que la Russie soviétique n’attend que cela pour entrer en scène. Or, tous les Rhénans, ouvriers compris, sont anti-bolchévistes... Et alors ils commencent à se tourner vers nous, qui apparaissons si tranquilles, si fermes et si forts, encore que, — là, en vérité, ils ne comprennent plus, — nous semblions nous défier de notre propre puissance, en tout cas redouter de nous en servir.