Page:Revue des Deux Mondes - 1923 - tome 13.djvu/677

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

parfaitement aimable pour la France, et qui fut très applaudie, M. des Ombiaux avait fait allusion au désir que le parti belge dont je viens de parler nous attribuait de vouloir, un jour, porter notre frontière jusqu’au delà de Dusseldorf et d’absorber tout le territoire rhénan de la rive gauche. L’orateur ne paraissait pas faire grand état d’une telle appréhension. Il s’en tenait certainement aux déclarations françaises, si répétées, et que nous savons, nous, si parfaitement sincères. Cependant, je pensai qu’il n’était pas tout à fait inutile de protester une fois de plus du désintéressement, à ce sujet, de l’immense majorité des Français. Mais, traitant l’affaire sur un ton humoristique, je demandai à M. des Ombiaux si l’on pouvait vraiment supposer, en Belgique, que cette France, toujours éprise de beauté, qu’il venait de célébrer, aimerait à prendre la physionomie cornue et pointue que lui donnerait le tracé d’une frontière qui, poussant au Nord jusqu’à Clèves, borderait sur cinquante lieues les limites orientales du Luxembourg, de la Belgique et de la Hollande.

On rit : l’aimable Belge, tout le premier. Peut-être, cependant, quelques-uns de ses compatriotes ne furent-ils pas désarmés. Le spectre de « l’encerclement français » hante certains esprits, à Bruxelles et à Anvers. Il semble cependant que de bien autres périls que celui-là menacent la Belgique. Souhaitons-lui de les vaincre sans de trop profondes convulsions.


Je ne connaissais M. Smeets que d’après le crayon tracé par ceux de nos collègues qui avaient eu l’occasion de le rencontrer en Rhénanie : « Ce n’est point du tout un docteur Dorten, un intellectuel doublé d’un homme du monde, mêlé aux grandes affaires politiques et financières. Plus jeune que le chef du parti rhénan autonomiste « dans le cadre de l’Allemagne » (retenons cette réserve), Smeets est un « self made man, » très actif, très vigoureux, combatif à souhait, car il faut l’être, et résolument, pour résister à l’énorme pression de tout l’organisme impérial et prussien dans la partie de la province rhénane où le pavillon aux léopards couvre volontiers les agissements, légaux ou non, des gouvernants de Berlin. Mais cet homme de courage et de foi, entouré d’une élite de fidèles aussi déterminés que lui, soutenu par la vaillante Lorraine, — de l’ancien pays annexé, — qu’est sa femme, joint à une remarquable justesse de vues générales, la connaissance parfaite du tempérament