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Page:Revue des Deux Mondes - 1923 - tome 13.djvu/941

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Jack aimerait bien à retrouver, afin de le boxer. Le même jour on attend l’heureux mortel dont Mme Bourgeon a fait choix, pour lui confier l’avenir d’Yvonne. C’est un ami de son quasi-gendre et qui répond au nom d’Henri Lévrier. J’ai à peine besoin de vous dire qu’Henri Lévrier est le passager d’avion qui a si fort déplu à Yvonne.

Cet Henri Lévrier est, dans l’ordinaire de la vie, un gentil garçon, contre lequel il n’y a qu’une objection : au départ pour un grand voyage qu’il vient de faire aux Indes, il avait la réputation d’un ivrogne fieffé. On le dit guéri : l’est-il en effet ? Gisèle est chargée de le mettre à l’épreuve. Nous apprenons alors, et Gisèle apprend avec nous, le secret d’Henri : il était amoureux et il est timide ; il aimait Gisèle, sans oser le lui dire ; lorsque Gisèle s’est mariée, ou tout comme, il a noyé son chagrin dans le vin... Ah ! si Gisèle avait su !... Mais puisque maintenant elle sait, et puisqu’il est juste qu’elle récompense Henri de sa longue attente, celui-ci n’a plus aucunes raisons de boire. Seulement, pour qu’il échappe aux manigances matrimoniales de Mme Bourgeon, il faut lui conserver jalousement cette réputation de pochard qui fait de lui le gendre impossible. Et ainsi s’arrange la vie, comme dans un vrai ménage. Hubert est trompé, et trompé par son meilleur ami : il serait marié réellement, qu’il ne pourrait espérer mieux.

Les deux amis sont d’ailleurs de plaisants bonshommes. Hubert, sot et avantageux, se fait à lui-même les compliments que les autres oublient de lui faire : « Voilà, murmure-t-il en aparté, un mot dont je ne suis pas mécontent ! » Quant à Henri, c’est l’amant discret et prudent, qui pousse jusqu’à l’extrême du raffinement, et jusqu’à exaspération delà femme aimée, les précautions d’ailleurs inutiles : langage convenu, faux télégrammes, etc. Toujours par crainte d’être suivi, il prend, pour aller retrouver Gisèle, un chemin parfaitement impraticable ; il glisse, manque de se noyer ; on lui administre un erre de wisky, suivi de plusieurs autres ; et le voilà, mais au vrai cette fois, dans les vignes du Seigneur.

C’est la scène principale, et je ne dirai pas celle pour laquelle toute la pièce a été faite, mais celle qui est au centre de la pièce. La vérité est dans le vin : elle est aussi dans le wisky. Henri Lévrier a le wisky tendre. Il est pris soudain pour son ami Hubert d’une de ces tendresses de pochard qu’on sait larmoyantes et expansives. Un irrésistible besoin le saisit de se confier à Hubert et de tout lui avouer. Il l’a fait... ce que vous savez. Le mot cher à Molière éclate sur ses lèvres, s’y étale avec ampleur, s’y prolonge avec