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et n’être plus attaqués. Dans la Ruhr comme sur le Rhin, nous ne cherchons rien de plus... Cette paix, à laquelle nous ne demandons pas un centimètre carré de territoire allemand, cette paix dans laquelle nous ne cherchons que nos réparations et notre sécurité, nous sommes résolus à l’établir enfin sur des fondements indestructibles. » L’opération de la Ruhr a eu cet heureux résultat de nous révéler un état d’esprit, des passions, des espérances et, déjà, des préparations, contre lesquels il est indispensable de prendre des précautions. L’Allemagne, dans cette crise, a dévoilé son vrai visage. Les prédicants de haine sont particulièrement dangereux chez un peuple si crédule (unpolitisch), quand ses passions sont en jeu, et si discipliné. L’emploi de la méthode forte a été rendu nécessaire par l’Allemagne elle-même et par la politique anglaise, mais elle n’est qu’un moyen ; le but c’est d’arriver avec l’Allemagne à une collaboration économique et financière qui est, pour elle, le seul chemin du salut et, pour nous, le seul moyen d’être payés. Nous tiendrons, jusqu’à ce que nous soyons parfaitement assurés de l’avenir, des gages à la fois défensifs et productifs, et nous ne nous en dessaisirons qu’à bon escient. On entend souvent demander si l’opération de la Ruhr paiera ; plus tard, sans doute ; mais, pour le moment il s’agit de faire naître en Allemagne un état moral qui l’incline à s’acquitter et d’y rétablir une situation matérielle qui lui permette de payer. La première chose que demande la France, c’est d’abord, comme l’a dit le Daily Mail, « la preuve que l’Allemagne a enfin l’intention d’être honnête. »

L’attitude du Gouvernement britannique continue d’être d’une correction parfaite et parfois amicale. Lors de l’arrestation du Président du Bureau des Finances à Cologne, les troupes anglaises, sans y prendre part, y ont assisté afin qu’il soit évident que les autorités britanniques n’y faisaient pas d’objection ; mais, en Angleterre, ce fut l’occasion d’une très vive polémique. L’Angleterre doit-elle maintenir sur le Rhin ses troupes et sa zone d’occupation ? La presse libérale et travailliste demande en général l’évacuation, et parmi ceux qui réclament le maintien, plusieurs, dont M. Lloyd George, n’en sont partisans que pour mieux surveiller et entraver l’action franco-belge. En définitive, les troupes restent, comme sir John Bradbury reste à la Commission des réparations, où il s’abstient de voter sans renoncer à collaborer à la rédaction des textes ; l’Angleterre n’a jamais aimé la politique de l’absence. Négligeons les journaux, comme le Daily News, et cette partie du public anglais qui, germanophile en 1914, l’est redevenue en 1918 ; observons la grande majorité saine de la