de Tolède ? Au-dessus d’un profond ravin, s’élève un des plus saisissants palais mauresques qu’il m’ait été donné de visiter. Je parcours ses jardins, ses salles, ses bains, ses galeries superposées, ses arcades légères, ses patios où murmurent des fontaines, ses tours carrées et crénelées, les masses de verdure qui s’y mêlent. Le beau séjour somptueux ! Quelles sont les annales d’un tel lieu, à la fois prison, forteresse, harem, dont les jardins de buis et de cyprès respirent la mort et la volupté ? Ma naïve ignorance s’étonne étourdiment qu’un tel lieu, Beït-Eddin, ne soit pas classé dans le trésor des images poétiques et dans le dictionnaire des rimes.
Tout un peuple était réuni dans ce décor romantique, tout un choix de types par ailleurs disparus, car le Liban est un refuge, une arche de salut pour les races traquées. Et c’est à bon droit que Gérard de Nerval y errait, à la recherche des femmes qu’il avait aimées dans des vies antérieures ; que le jeune Renan a pu, au détour d’un sentier, y rencontrer Jézabel ; et que nos soldats d’aujourd’hui y retrouvent les filles des Croisés. La fête de Beït-Eddin, ce jour-là, avait attiré des Maronites catholiques, des Druses idolâtres et des Metualis musulmans. Et au terme de la réception, leur foule m’a accompagné, quand je suis allé déposer sur le tombeau de nos soldats, morts durant l’expédition de 1860, les (leurs qui, depuis le matin, venaient de m’être offertes dans tous les villages. L’accueil que font ces populations au consul de France et à son compagnon est un effet de la gratitude vouée à notre drapeau, protecteur du Liban.
La journée s’achevait, quand nous sommes entrés à Deïr-el-Kamar, où nous devions passer la nuit. Quel délire de l’enthousiasme ! Cette ville fut jadis la plus considérable du Liban. Au temps de l’émir Bechir, elle possédait le monopole du sel, des allumettes et peut-être de la soie. Depuis le chemin de fer, elle a dû céder la primauté à Zahlé et à Aley. Mais qu’elle demeure plaisante, accrochée au flanc du profond ravin, surtout à cette heure de notre arrivée, où nous la voyons toute bruissante et vibrante d’amour pour la France !
Visite immédiate des écoles. Les Maristes ont 240 garçons ; les sœurs de Saint-Joseph, 265 élèves.
Leçon de français. Le maître interroge :