UNE ENQUÊTE
AUX
PAYS DU LEVANT[1]
II[2]
III. — LE TOMBEAU D’HENRIETTE RENAN
e que mon imagination réclame de ces premiers jours de
Beyrouth, c’est un pèlerinage Renanien, une visite aux
lieux que le magicien habita et célébra, et d’abord au tombeau
de sa sœur Henriette, à Amschit. Ah ! je sais tous ses
défauts, et quand j’étais jeune, ils m’excitaient au point que je
le bâtonnai lyriquement. Ce n’est pas un procédé qui me permette
de me tenir quitte de toutes mes dettes envers le vieux
maître. Car j’ai des dettes. Il nous a soulevés de terre. Vous dites
qu’il déchristianise ? Eh bien ! il nous a christianisés. Et puis
croyez-vous donc que ce ne soit rien d’avoir annexé à notre
domaine spirituel ces terres de fermentation religieuse ? C’est
avec lui qu’en esprit, bien souvent, nous les avons parcourues.
Et je désire qu’une de mes premières démarches m’y rapproche
de l’homme à qui je dois originairement de les aimer.
J’ai cette bonne fortune que M. Gaillardot m’offre d’être mon guide.
Gaillardot ! Un nom familier aux amis de Renan. Peu après 1830, un docteur Gaillardot fut de cette poignée de Français