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Page:Revue des Deux Mondes - 1923 - tome 15.djvu/598

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Je me rends ensuite au Collège militaire où m’attend le ministre de la Guerre, le docteur Moreno. Nous passons lentement en automobile devant le front des trois divisions, infanterie, artillerie, cavalerie, — c’est la seule revue que j’aie jamais passée en cet équipage, — qui défilent ensuite devant nous ; la tenue est très brillante et le défilé très correct. C’est la tenue allemande des cadets qui se présentent au « parade schritt, » le pas de l’oie ; les instructeurs allemands ont sévi dans presque tous les Etats de l’Amérique du Sud et y ont imprimé leur marque, qui heureusement ne paraît pas indélébile [1].

Le ministre de la Guerre me demande de parler de la Grande Guerre aux élèves-officiers, et je m’exécute sans façon. Je raconte rapidement la première victoire de la Marne, que la propagande de nos ennemis avait présentée comme un repli voulu, et que je résume simplement d’après les publications allemandes. Le ministre de la Guerre nous invite à déjeuner au Collège militaire, puis je rends visite au ministre des Affaires étrangères, M. Pueyrredon ; au palais du Congrès, le bureau des deux Chambres reçoit la mission française ; nous visitons ensuite la municipalité.

A la légation de France, je prends contact avec les nombreuses organisations de la colonie française, qui groupent 35 000 de nos concitoyens : certaines de nos préfectures comptent moins d’habitants. Je suis très touché de voir que la colonie belge s’est jointe à nos nationaux. Puis nous nous rendons au Cercle de la Presse. Buenos-Ayres possède deux grands journaux conçus sur le modèle des quotidiens américains, qui comprennent de 16 à 32 pages et parfois davantage, la Prensa et la Nacion. Ils publient très souvent des articles dus à la plume de hautes personnalités françaises et possèdent d’importants bureaux à Paris et des correspondants dans le monde entier ; les Français disposent d’un excellent organe, le Courrier de la Plata, qui est dans sa cinquante-septième année, et toutes les colonies étrangères ont leur journal. En outre, plusieurs feuilles des États-Unis du Nord ont ici un correspondant. Quatre cents journaux s’impriment dans la République Argentine.

C’est dire l’importance de la presse dans cette capitale qui compte plus d’un million et demi d’habitants. Le Docteur Tito

  1. Les uniformes prussiens et le pas de parade ont été peu après supprimés dans l’armée argentine.