Page:Revue des Romans (1839).djvu/307

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cellente compagne, qui, avec toute sa finesse de mère, son économie, son affection conjugale, déjoue ses plus sages projets par sa vanité et sa folle complaisance pour ses filles. Enfin, M. et mistress Primrose, entourés de leurs enfants, composent un tableau de famille si parfait, que peut-être il n’a jamais été égalé. Il est tiré, à la vérité, de la vie réelle, et s’éloigne de ces incidents extraordinaires auxquels ont recours les auteurs qui veulent surtout surprendre ; mais la simplicité de ce livre charmant rend plus durable le plaisir qu’il procure. On lit le Vicaire de Wakefield à tout âge ; on le relit sans cesse, et l’on bénit la mémoire de l’auteur qui a cherché à nous réconcilier avec la nature humaine. Soit que nous choisissions les incidents pathétiques et déchirants de l’incendie, les scènes de la prison, les parties plus gaies et plus légères du roman, nous trouvons toujours les sentiments les plus vrais et les plus purs exprimés avec une rare élégance. Peut-on citer un caractère plus pur et plus noble que celui de cet excellent pasteur s’élevant au-dessus de l’oppression, et travaillant à la conversion des criminels parmi lesquels l’a jeté son lâche créancier ? Dans beaucoup trop d’ouvrages de ce genre, les critiques sont obligés de chercher à justifier ou de censurer des passages qui sont dangereux pour l’innocence et la jeunesse ; mais le laurier de Goldsmith est sans tâche : il a écrit pour faire aimer la vertu, pour rendre le vice odieux, et il a réussi à se placer au premier rang parmi les écrivains anglais.

LE VILLAGE ABANDONNÉ. — On a plusieurs traductions françaises en vers et en prose de cette charmante nouvelle, qui se distingue par l’élégance, le naturel et le pathétique. Quelques-uns des amis de l’auteur, auxquels il avait communiqué le plan de son poëme, ne goûtaient pas ce plan, et pensaient que cette dépopulation de village n’existait point ; mais Goldsmith, qui était certain du fait et qui se rappelait avoir vu en Irlande des villages totalement dépeuplés, persista dans son idée et publia son poëme, que le public accueillit avec enthousiasme. Lissoy, village près de Ballymahon, où le frère de Goldsmith avait une cure, passe pour être le lieu décrit dans le poëme du Village abandonné. On montre encore l’église qui couronne la montagne voisine, le moulin et le lac, l’aubépine, etc. Il est à présumer que la description doit beaucoup à l’imagination du poëte, mais c’est un hommage qu’il s’est plu à rendre à la patrie de ses pères.

LE CITOYEN DU MONDE, ou Lettres d’un philosophe chinois dans l’Orient, 3 vol. in-12, 1763. — C’est une imitation des Lettres persanes de Montesquieu.

CONTES MORAUX, trad. par le prince de Galitzin, in-8, 1804. — Ces contes sont tirés des Essais de l’auteur. Ceux qui veulent