Page:Revue des Romans (1839).djvu/334

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épouse, sous le prétexte de venir rendre hommage à sa mère, femme de Gaston Phœbus, qui s’était retirée près de lui après l’assassinat par Phœbus, de Pierre de Béarn. Yvain désirait ardemment une réconciliation entre son père et sa mère ; Charles de Navarre profita de ce désir et de la naïve simplicité d’Yvain, auquel il remit un petit sachet plein d’une poudre miraculeuse qui devait ramener son père à de meilleurs sentiments dès qu’il en aurait goûté. Yvain se chargea de mêler cette poudre aux aliments de son père ; mais au moment où il exécutait ce dessein, un page le dénonça, et Phœbus fut sauvé, car la soi-disant poudre miraculeuse était un violent poison. Le comte de Foix, croyant que son fils avait tramé avec sa mère un complot contre ses jours, s’abandonna aux transports de sa fureur, et dans un accès de frénésie il tua Yvain. Trop tard désabusé, il mourut de désespoir, après avoir déjoué les coupables intrigues de Charles de Navarre, qui expia par sa mort les crimes de sa vie ; le feu prit à son lit, et il fut presque entièrement consumé avant qu’on pût le secourir. — Le comte Gaston Phœbus, tel que le représente l’auteur, est le type fidèlement reproduit de ces hauts et puissants seigneurs, exerçant un pouvoir souverain, étalant un faste royal, superbes et cruels, se livrant sans retenue à la fougue de leurs passions, et faisant tout plier sous leur main de fer. La féodalité du XIVe siècle apparaît armée de toutes pièces dans le château de Coarase : le souverain, le feudataire, les prêtres, le chevalier, le vassal, l’écuyer, le page, la chasse, la guerre, l’amour, tout s’agite, se pose, parle selon les mœurs et les lois de l’époque, dans ce roman plein de charme et d’intérêt, dans cette histoire puisée aux bonnes sources, formulée avec une élégante et précieuse concision.

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GUIRAUD (le baron P. Mar. Alex.),
de l’Académie française, né à Limoux le 25 décembre 1788.


FLAVIEN, ou de Rome au désert, 3 vol. in-8, 1835. — M. Guiraud a voulu personnifier le doute dans le héros de son roman. Flavien est à la fois le produit et l’image d’une société mobile et flottante qui ne sait à quelles étoiles se confier, sur quels autels brûler son encens, qui se débat entre le passé et l’avenir, dégoûté de l’un et n’ayant point le cœur et le bras assez fermes pour s’emparer de l’autre. Deux femmes, Faustine et Néodémie, sont les deux pôles vers lesquels se tournent tour à tour les désirs de Flavien. L’une représente la société païenne avec ses chaudes extases et ses magnifiques emportements ; l’autre le christianisme naissant avec ses virginales attitudes et sa pudeur naïve. La veuve de l’em-