noires et multipliées du château royal de Plessis-les-Tours, un jeune Écossais rencontre aux environs de ce château deux étrangers, avec lesquels il entre en conversation, et auxquels il demande conseil sur l’intention qu’il a d’entrer dans la garde écossaise du roi Louis XI. La naïveté des aveux du jeune homme, qui n’était autre que Quentin Durward, plut à ses nouvelles connaissances, dont le plus âgé, qui se désignait lui-même sous le nom de maître Pierre, et qui appelait l’autre son compère, avait dans la physionomie quelque chose d’imposant et de sinistre, qui causait une espèce d’effroi. Maître Pierre invita l’étranger à déjeuner, et comme, pour arriver au village de Plessis, ils furent obligés de tourner la montagne au haut de laquelle se trouvait le château, maître Pierre avertit le jeune homme qu’il ne devait pas s’écarter du sentier qu’ils suivaient, et même qu’il devait en tenir le milieu très-exactement, parce que à droite et à gauche le terrain environnant était coupé de piéges, de trappes armées de faux, sorte de fortifications invisibles que le roi jugeait nécessaires pour défendre sa demeure. Tout cela déplut fort à Quentin. Cependant, lorsque, arrivé à l’extrémité du village, dans une grande et belle maison, il se vit en présence d’un succulent déjeuner, il reprit sa gaieté ordinaire et se disposa à faire honneur à son hôte. Maître Pierre restait spectateur oisif du brillant appétit de son jeune convive. Celui-ci en fit l’observation. « Je fais pénitence, dit maître Pierre, et je ne puis rien prendre avant midi. » La conversation qui suivit roula presque entièrement sur les projets du voyageur. Maître Pierre lui conseilla d’entrer dans la garde écossaise, et lui présagea une grande fortune ; mais le souvenir des trappes armées de faux rendait Quentin fort peu docile sur cet article ; il céda pourtant ; car enfin, on l’a déjà deviné, maître Pierre était le roi lui-même. Tel est le moyen employé par Walter Scott pour introduire Quentin Durward dans le château de Plessis, où nous laisserons au lecteur le plaisir de l’y accompagner. Qu’il lui suffise de savoir que le héros de ce roman, qui n’avait d’autre bien que son épée en arrivant en France, s’éleva, à force d’amour et de courage, au plus haut degré de la fortune. La cour de Louis XI et celle de son éternel ennemi le duc de Bourgogne, forment le fonds historique sur lequel Walter Scott a bâti son ouvrage. Ces deux princes y sont représentés avec une vérité effrayante. Le caractère sombre et cruel du monarque français, son hypocrisie, sa lâche superstition ; la fougue indomptable et l’orgueil de Charles le Téméraire, tout est mis en action avec un art admirable. On voit sur le second plan Olivier le Daim, à la fois barbier et ministre d’État ; le cardinal de la Balue, qui finit sa vie dans une cage de fer ; enfin, ce compère de Louis XI, ce Tristan l’Hermite, qui,
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