Page:Revue des questions historiques, Tome X, 1871.djvu/311

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notre répugnance, et cédant à des instances réitérées, nous avons donné notre consentement authentique et public à ladite élection. Quant à certains articles que vous avez traités avec vos ambassadeurs et qui ne doivent être divulgués ni par vous, ni par eux, attendu la demande que vous nous avez faite de pouvoir en communiquer avec trois ou quatre personnes, au delà du nombre que nous avions fixé, nous consentons bien volontiers à ce que vous en confériez avec trois ou quatre et même un plus grand nombre de personnes, au delà du nombre susdit, selon qu’il paraîtra utile à votre royale circonspection, car nous avons la certitude que vous ne révélerez ces choses qu’à ceux que vous savez être également pleins de zèle et d’amour pour notre honneur et le vôtre[1]. »

Quelles étaient ces affaires que l’on tenait si secrètes ? On l’ignore, et mieux vaut ne pas hasarder de conjectures. Clément fut couronné à Lyon, le 14 novembre 1305, devant une nombreuse assemblée : Philippe le Bel voulut assister à cette cérémonie et fit dès lors des ouvertures au Pape au sujet des Templiers.

Nul n’ignore qu’au commencement du xiie siècle furent fondés deux ordres religieux et militaires destinés à protéger les pèlerins et à défendre les armes à la main les saints lieux. Les chevaliers du Temple et les hospitaliers ou chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem rendirent de grands services jusqu’à la fin du xiiie siècle, mais leur action ne se renferma pas dans les pays d’Asie. Ils obtinrent, en Europe, d’immenses richesses, et leurs possessions territoriales s’étendaient sur une partie du continent. La rivalité se mit entre les deux ordres, au grand détriment dés intérêts de la Terre sainte, et leur influence, changeant de théâtre, tendit à s’exercer en Occident. Les Templiers surtout acquirent une puissance redoutable pour le roi, à la juridiction duquel ils échappaient. Ils réunissaient les deux grandes forces, la croix et l’épée ; ils formaient une association ne relevant que de son chef et nominalement du Pape : ils étaient riches et tiraient vanité de leur pouvoir ; on disait : Orgueil de Templier. Quand on étudie dans les archives les actes qui constatent leur fortune et la révélation de leur puissance, on voit qu’ils attiraient tout à eux, dans les villes et dans les campagnes.

  1. « Scimus enim quod illa non revelabis aliis nisi quos credis honorem nostrum et tuum diligere et zelari. » Ms. 10919, fol. 48 ro. Baluze, t. II, p. 62. — Conf. Rabanis, Clément V et Philippe le Bel, p. 76.