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IS-ṬU-BAR — GILGAMÈS

vant dans un commerce perpétuel avec les puissances supérieures et souterraines, n’ignoraient rien du ciel, de la terre et des enfers. Ainsi on eut les légendes des dieux, les légendes des héros, les légendes des démons, développant sous forme brillante les notions religieuses primitives, étalant avec art tout le contenu de l’âme antique, ses expériences, ses conceptions, ses rêves. Les mages exposèrent en de longs récits, le mystère des origines et les secrets du pays des morts, ils discoururent sans fin sur les aventures des héros. Ils contèrent là-dessus des choses étranges : comment, tout étant né de l’Abîme, Marduk finit par triompher de Tiamat ; comment Istar franchit les sept portes de l’Aral ; comment s’illustra Gilgamès, à la suite de nombreux exploits et d’une périlleuse odyssée… Combien d’autres choses encore tout aussi merveilleuses !

Le succès de cette littérature mythique fut considérable. C’est que les prêtres chaldéens, outre qu’ils passaient pour inspirés, mirent en œuvre, dans leurs écrits, toutes les ressources d’une magie prestigieuse. Le charme opéra et exerça à distance de mystérieuses influences. De telles légendes dépassèrent le seuil des sanctuaires d’Eridu, de Sippar et d’Uruk, elles se répandirent en Judée, en Phénicie, en Grèce et de là, jusqu’aux confins du monde barbare. L’impression profonde qu’elles firent sur les antiques générations, laissa des traces durables ; elle n’a pas encore complètement disparu parmi nous.

Nous nous proposons ici de vous conduire dans cette basse Chaldée, mère des traditions, autour de la ville d’Uruk, bien avant l’époque d’Abraham, de vous raconter, d’après les textes, la légende de Gilgamès, de reproduire, telle que nous l’avons recueillie de la