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CE QUI SE PASSE DANS LE MONDE

Au Tonkin.

Les derniers jours vécus par M. Doumer sur le sol de l’Indo-Chine Française marqueront à jamais dans nos annales coloniales. Le gouverneur-général a inauguré en présence de l’empereur d’Annam, du ministre de France à Pékin, de l’amiral commandant l’escadre, le fameux pont du Fleuve Rouge sur lequel passe le chemin de fer de Hanoï à Haïphong. Long de 1.700 mètres, reposant sur d’énormes piles qui s’enfoncent à trente mètres au-dessous du niveau des eaux, il a été construit en trois années et a coûté un peu plus de 6 millions. Ce merveilleux ouvrage d’art a frappé de stupeur les populations indigènes et a plus fait que bien des victoires pour consolider le prestige de la France. L’inauguration du pont a été précédée de celle de la Faculté de médecine indigène établie à Thaï-Ta, près de Hanoï, et de celle des palais provisoires qui vont contenir l’Exposition Indo-Chinoise, laquelle s’ouvrira au mois de novembre prochain. Une série de fêtes a eu lieu à l’occasion de ces diverses solennités : revues, carrousels, banquets, illuminations, représentations de gala. L’empereur Thanh Taï s’est montré partout, jouissant de tous les spectacles avec une joie enfantine. Peu de jours après, M. Doumer s’embarquait pour revenir en France. Son successeur n’est pas encore désigné. On ne peut que lui souhaiter une administration aussi féconde. L’œuvre accomplie en Indo-Chine par M. Doumer est grandiose. Une certaine curiosité s’attache aux pas de notre ancien gouverneur-général. On sait qu’il est rentré dans la vie politique. Élu sans concurrent, beaucoup le désignent comme un chef éventuel de gouvernement. Le zèle, l’intelligence, l’habileté, le tact qu’il a déployés là-bas promettent. Il est très probable qu’avant longtemps, nous le verrons au pouvoir. Quelques paroles, déjà prononcées par lui, semblent indiquer que sa principale préoccupation sera le relèvement commercial de la France ; il souhaite de lui faire jouer de nouveau un rôle prépondérant, non pas en Europe ou nous n’avons présentement aucun changement à poursuivre, mais dans les régions lointaines où lui-même a tant contribué à rétablir le prestige de notre drapeau. Ce serait un beau plan, propre à rallier tous ceux que lassent les mesquineries électorales et les disputes de clocher. Nous reviendrons prochainement, et en détail, sur les réformes opérées par M. Doumer en Indo-Chine.