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CÉCIL RHODES

au bon effet produit sur sa santé par l’air très sec et très vivifiant de l’Afrique du Sud. Non seulement, il s’enrichit rapidement, mais, apercevant tout de suite le défaut capital des exploitations diamantifères morcelées et en guerre les unes avec les autres, il résolut de les unir et y parvint ; sa réputation de financier fut établie du coup. En 1881, il entra dans le cabinet de la colonie du Cap dont il fit partie jusqu’en 1884. Cette année là, ayant obtenu du gouvernement Britannique que des troupes fussent envoyées dans le Bechuanaland où il exerça les fonctions de gouverneur, il fit proclamer l’annexion à l’Empire de tous les territoires situés au sud du Zambèze et dont les Allemands songeaient à s’emparer. Il s’occupa aussitôt de rendre cette annexion effective. En 1888, il sut imposer à Lobengula, roi des Matabélès, le protectorat Anglais. Les Matabélès étaient une tribu Zoulou, émigrée en 1817 et que les Boers rejetèrent, d’abord au delà du Vaal en 1836, puis au delà du Limpopo qui forme la frontière actuelle du Transvaal. Les Matabélès, établis définitivement dans cette région, qui s’appelait hier le Matabeleland et s’appelle désormais la Rhodesia, l’avaient dépeuplée et avaient rejeté vers la mer tout l’effort de la colonisation portugaise et des missions. Cecil Rhodes poussa plus loin et fit attribuer à la British South Africa Company qu’il venait de fonder (1889), les territoires situés au nord du Matabeleland. En 1890, on y fonda la ville de Fort Salisbury qui est, avec Umtali et Buluwayo, un des postes avancés de la civilisation Européenne dans ces parages. De là, le chemin de fer et le télégraphe gagnent le lac Tanganika. Sur ces régions, le Portugal prétendait avoir des droits ; un ultimatum le força d’y renoncer (1891). Peu après, une insurrection des indigènes donna lieu à une répression très sévère. En 1895, le Mashonaland et le Matabeleland, fusionnés sous le nom de Rhodesia, reçurent une organisation complète et, dès lors, le progrès y marcha à pas de géants. En 1896, Cecil Rhodes arrêta, à lui tout seul, une nouvelle insurrection prête à éclater. Peu après, les droits de la Compagnie privée qui avait organisé le pays, furent transférés en grande partie au gouvernement du Cap et l’Angleterre se trouva titulaire d’un empire grand comme toute l’Europe, moins la Russie.

Telle est l’œuvre. En y réfléchissant on n’est pas surpris que les Sud-Africains aient appelé Cecil Rhodes, le « Napoléon du Cap ». De même que l’empereur avait fabriqué lui-même — et non hérité — l’épée avec laquelle il vainquit le monde, Rhodes fut l’artisan