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LE VOYAGE PRÉSIDENTIEL EN ALGÉRIE ET EN TUNISIE

détachées de la métropole, la légion étrangère et les corps spéciaux (zouaves, spahis, turcos, chasseurs d’Afrique). Les Français et naturalisés ne doivent qu’un an de service à condition de demeurer dix années au moins en Afrique ; les musulmans ne sont pas astreints à l’obligation ; les turcos et les spahis se recrutent par engagements volontaires avec primes. Les cavaliers et fantassins indigènes des territoires militaires sont constitués en gamme dont les officiers qui commandent ces territoires prennent la direction en cas de besoin ; dans le Sahara on a constitué des corps de tirailleurs Sahariens et de Meharistes.

M. Loubet, pendant son voyage, ne s’est point ménagé ; la chose avait son importance. En France même, la localité devant laquelle le train présidentiel passe sans stopper se console en songeant qu’une prochaine occasion lui permettra d’acclamer le chef de l’État. Les populations Algériennes ne sauraient se flatter du même avantage ; pour elles, l’occasion perdue sera longue à retrouver. Il était donc infiniment souhaitable que M. Loubet pût se laisser haranguer par le plus de municipalités possible et accepter autant de banquets que son temps et son estomac le lui permettraient. C’est ce qui a eu lieu ; et lorsqu’on songe à la longueur et souvent à l’inconfort des trajets accomplis sur des réseaux médiocres, aux fatigues d’une représentation incessante et d’un climat inhabituel, on doit savoir gré au Président de son inlassable persévérance et de sa continuelle bonne grâce. Nous lui avons un second motif plus important encore — de reconnaissance. Les paroles qu’il a prononcées au cours de voyage ont été des plus heureuses. Or si, dans la métropole, les discours présidentiels participent toujours un peu de ce qu’on a appelé avec irrévérence des « aspersions d’eau bénite de cour », ces mêmes discours adressés à des chefs arabes peuvent contribuer à orienter l’avenir dans une voie désirable ou néfaste. L’homme du désert écoute avec une religieuse attention les mots qui tombent de la bouche de ses maîtres, de celui d’entre eux surtout qui parle comme représentant supérieur de la Force par laquelle il a été subjugué ; ces mots, on peut en être certain, il les rumine ensuite en son esprit et, selon les conséquences qu’il en tire, détermine ses actes futurs. Le Président de la République a été très heureu-