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CE QUI SE PASSE DANS LE MONDE

pour en neutraliser les effets que Léopold ii s’est réconcilié avec l’empereur d’Autriche en lui rendant visite à Vienne — et s’est entretenu avec le président Loubet et avec M. Delcassé, à Paris. L’appui de la France en cette occasion lui sera fort utile, et nous ne devons pas le lui marchander. La note anglaise contre le gouvernement et l’administration du Congo est probante par son néant ; rien que des bruits vagues, des accusations imprécises, des phrases sans portée. Derrière ce document apparaît nettement la pensée dont s’inspirent les instigateurs de cette détestable affaire ; ils cherchent à fournir à l’Angleterre des moyens de s’emparer d’une belle portion du territoire congolais sous prétexte d’humanité ; il est désolant que des hommes de la valeur et de la droiture de sir Charles Dilke se soient égarés en si mauvaise compagnie. Un nouveau pamphlet de M. Fox Bourne, dépassant les précédents en violences furieuses, a été distribué aux membres de la conférence interparlementaire réunie cet été à Vienne et composée comme on sait, de représentants des différents parlements d’Europe. C’était un piège habilement tendu à la conférence. Mais les délégués belges ont aussitôt mis sur le tapis la question des îles Fidji où les anglais imposent aux indigènes ce même travail forcé qu’ils s’indignent ensuite de voir les Belges réclamer parfois des Congolais. Pan ! Pan ! Bien répondu. La conférence a écarté les deux débats et s’en est tenue à des questions d’un autre ordre et de nature moins troublante, telle que la confection d’un code de droit international qui mériterait véritablement ce nom. Entre temps, il est à croire que le roi des Belges, homme d’affaires de premier ordre, aura su obtenir des financiers, avec lesquels il se met volontiers en rapports directs, des concours susceptibles d’accroître la prospérité de ses domaines exotiques — cette prospérité qui tire l’œil des Anglais d’Afrique. N’oublions pas pourtant la belle protestation de sir Harry Johnson contre les calomnies de ses compatriotes. Il les déclare non fondées et rend pleine justice à la façon dont a été organisé et administré l’état du Congo. C’est l’honneur de l’Angleterre, ces actes d’indépendance et de courage qui se produisent spontanément, ces individualités qui se posent hardiment en travers d’un courant, démentent une opinion répandue ou dénoncent une injustice intéressée. Ce sont là les Bayards du modernisme. Il en existe un peu partout, Dieu merci. Mais l’Angleterre en a produit en plus grand nombre que les autres nations et leur franchise a, en général, une crudité savoureuse.