appliquer la loi… La loi d’obligation n’existe jusqu’ici que sur le papier. »
Il ne suffit pas d’ailleurs d’être inscrit ; il faudrait une fréquentation constante. Et, à cet égard, le témoignage de M. Cazes n’est pas le seul ; en voici un autre, qui émane de M. Forfer, inspecteur de l’Académie du département de l’Aisne, et qui se rapporte à l’année 1904 : « Il n’y a pas moins de 3 000 enfants de 6 à 13 ans qui n’ont jamais paru à l’école dans le département. À côté de ceux-là, totalement illettrés pour la vie, il y a ce qu’on pourrait appeler les demi-écoliers ou quarts d’écoliers, qui, après un vague stage à l’école, fréquemment interrompu, s’en vont avec de vagues connaissances, qu’ils s’empressent d’oublier. Sait-on combien, sur 60 000 inscrits d’âge légal, nous en avons reçu en classe plus de 150 jours, du 1er juin 1901 au 1er juin 1902 ? Pas même les deux tiers, soit 38 000 environ. Parmi les autres, 8 300 ont paru en classe 120 ou 130 jours ; 5 000 s’y sont présentés 70 à 80 jours ; 4 800 y sont venus moins de 50 jours[1]. » Avant MM. Cazes et Forfer, M. Guillaume, professeur au collège Chaptal à Paris, dans son rapport présenté en 1900 au Congrès international de l’enseignement, après avoir constaté que le nombre des inscrits à l’école décroissait chaque année, avait ajouté ce qui suit : « À côté de la catégorie des enfants non-fréquentants, des non-inscrits, se place la catégorie, beaucoup plus nombreuse, de ceux qui, bien qu’inscrits, fréquentent l’école d’une manière irrégulière et incomplète, comme en témoignent des documents précieux : les rapports annuels des inspecteurs d’académie aux conseils départementaux. Ce n’est guère que pendant cinq mois, six mois au plus, que les élèves de 6 à 13 ans suivent les classes avec une assiduité relative. » Enfin, le Journal des Débats, dans l’article que j’ai déjà cité, constate que le nombre des absents s’élève, dans les régions montagneuses, jusqu’à 49 p. c.[2].
Tels sont les faits. Qu’est-ce à dire, si ce n’est que dans notre siècle, où dominent l’esprit d’indépendance et la démocratie, les