énumération chronologique ne donnerait pas une vue d’ensemble de l’œuvre.
Pour être complet, il faudrait rappeler encore la lutte de l’historien littéraire contre les médiévistes, contre les admirateurs de la Chanson de Roland, contre une érudition « qui fait la docte et la curieuse » ; on y verrait que la conception que M. Brunetière se faisait de l’art lui fermait le moyen âge. Il faudrait montrer les études de littérature comparée encouragées, illustrées, fécondées par un enseignement qui montrait l’aspect général des choses, la connexité des littératures nationales dans la littérature européenne.
Il faudrait rappeler aussi les déceptions subies, les tentatives malheureuses. Le Saint, de Fogazzaro, traduit et publié dans la Revue des Deux Mondes, a été condamné, et la lettre des catholiques partisans d’une transaction entre l’Église et la loi de séparation n’a pas eu l’écho attendu.
Gardons-nous de grossir ces circonstances qui ont leur importance à leur jour, mais qui n’éclairent pas particulièrement le cas de l’illustre converti. L’historien littéraire qui eut tant d’adversaires et fit parfois l’effet d’un iconoclaste, le polémiste qui ne fut pas toujours d’accord avec ses coréligionnaires, pourrait faire l’effet, dans les divers domaines, d’un amateur, amateur théoricien, dogmatique, et parfois singulièrement clairvoyant. Pour le juger, il faut attendre que le temps, qui seul a toujours raison, ait fait le départ entre les idées qui vivront et resteront, et les bruits d’une heure ou d’une année. Brunetière restera du moins un grand exemple de ces hommes qui furent placés entre les négations de leur esprit et la voix de leur conscience, entre les deux infinis dont parla Pascal, entre la « raison pure » et « la raison pratique », et qui comprirent que l’homme a autre chose à faire sur terre qu’à étudier les infiniment petits, ou à raisonner de méthodes scientifiques.