Page:Revue générale des sciences pures et appliquées, année 15, numéro 9, 1904.djvu/16

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dans lesquels on peut exiger de l’élève la construction géométrique d’une longueur, en même temps que son calcul numérique, les deux procédés se vérifiant l’un par l’autre. Les théorèmes sur les aires et les volumes seront, cela va sans dire, l’occasion d’une revision du système métrique. De même que pour le calcul numérique, on utilisera les moyens auxiliaires, tels que l’emploi du papier quadrillé, de nature à simplifier la tâche de l’élève.

Plus tard, quand il saura résoudre des triangles, il prendra l’habitude d’accompagner chaque résolution de triangles d’une construction graphique qui lui permettra de contrôler approximativement le résultat de ses calculs et d’éviter, par suite, certaines erreurs absolument grossières, qui ne sont malheureusement pas rares.

Cet emploi systématique de constructions graphiques dans l’enseignement de la Géométrie élémentaire aurait, d’ailleurs, bien d’autres avantages ; il permettrait de transformer, en la simplifiant beaucoup, l’exposition des éléments de la Géométrie. Par exemple, la plupart des élèves comprennent très difficilement ce que signifient au juste les théorèmes sur les cas d’égalité des triangles. On leur dit que, pour que deux triangles soient égaux, il suffit que l’on sache que leurs côtés sont égaux ; et on leur dit aussi que deux triangles égaux ont tous leurs éléments égaux. Il y a là une petite subtilité très rarement comprise, je l’ai bien des fois constaté aux examens du baccalauréat. Si on leur disait ce que nous savons tous : ce théorème signifie qu’avec trois côtés donnés, on ne peut pas construire deux triangles différents, on serait, je crois, bien mieux compris, car le cas d’égalité aurait une base concrète : les constructions faites par l’élève. Bien des questions de Géométrie appelleraient des remarques analogues.

Mais ce serait m’écarter de mon sujet que d’insister sur ces questions, qui exigeraient une étude longue et approfondie ; je me contente de vous rappeler les remarques que nous faisait ici M. Henri Poincaré sur le pantographe et sur l’utilité qu’il peut avoir pour faire comprendre les notions d’homothétie et de similitude.

En résumé, nos conclusions sont les suivantes, en ce qui concerne le dessin géométrique : établir une union intime entre cet enseignement et celui de la Géométrie ; ne pas le séparer non plus des calculs numériques.

En dehors du calcul numérique et du dessin géométrique, nous ne trouvons actuellement presque rien en fait d’exercices pratiques de Mathématiques ; en tout cas, rien de systématiquement organisé. Réservant pour l’instant la question d’une organisation générale et systématique, on peut signaler bien des moyens qui pourraient être employés pour introduire plus de vie et de sens du réel dans notre enseignement mathématique ; il y a des essais à faire, pas tous en même temps au même endroit, mais ici ou là, suivant les circonstances, les dispositions des élèves, les ressources locales, les goûts du professeur.

Par exemple, on peut demander à chaque élève d’apporter dans sa poche un mètre en ruban ; lui faire mesurer les deux côtés d’un rectangle (du tableau noir, d’une table, etc.), et lui faire calculer la diagonale, puis vérifier le résultat. On peut, de même, faire calculer expérimentalement le rapport de la circonférence au diamètre, le volume d’un vase de forme simple, etc. On habituera aussi les élèves à évaluer les longueurs et les angles à vue d’œil. Tous ces exercices contribueront à donner la notion plus exacte de l’importance qu’il faut attacher aux dernières décimales dans un calcul numérique, et à montrer combien il est absurde de rechercher dans le résultat une exactitude dépassant celle des données expérimentales.

Dans des classes plus élevées, il sera souvent possible de faire faire aux élèves de vraies opérations d’arpentage sur le terrain, avec des appareils simples, et le plus possible de vérifications par des calculs numériques.

Dans l’enseignement de la Cosmographie, il y aura, bien entendu, avantage à montrer le plus possible le ciel aux élèves en leur apprenant à le voir. Même à l’œil nu, on peut faire bien des observations ; dans certains cas, on trouvera l’occasion de se servir d’une montre à secondes ; parfois, on disposera d’une petite lunette. Il vaudra toujours mieux faire des observations simples et nombreuses que des observations précises, mais rares. L’évaluation approchée des angles à vue d’œil pourra leur être utile ; ils devront savoir quel est le diamètre apparent du Soleil et de la Lune, etc.

L’organisation de ces exercices pratiques d’arpentage et de Cosmographie se heurtera quelquefois à des difficultés administratives. Il faut du beau temps pour l’arpentage, du soleil dans certains cas pour la Cosmographie, une nuit étoilée dans une autre occasion, etc. Or, les nuages n’ont pas des mœurs très administratives ; ils ne se prêteront pas toujours à l’horaire des classes, dont la belle ordonnance fait l’orgueil de l’antichambre de M. le Proviseur. Il pourra être utile de déplacer une classe de latin pour observer une éclipse, ou de retarder l’heure du coucher pour voir une occultation d’étoile par la Lune. Tout cela sera très simple, avec de la bonne volonté, si la conviction s’affirme partout que ce sont là des choses sérieuses et non des amusements.

En Mécanique aussi, on peut faire bien des