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villes, ou du moins on ne l’y rencontre que très tard. Les noms que portent ses membres : jurati, pares, consules, choremanni, consiliarii, denominati, ne se trouvent pas dans le plat pays.

De même que le tribunal urbain est une conséquence de la reconnaissance de la ville comme territoire juridique distinct, de même le conseil s’explique par le groupement de la population urbaine en commune. Avant l’époque où la bourgeoisie se forme en corporation jurée, on ne peut comprendre qu’elle ait possédé un collège de délégués chargés d’agir en son nom, de la représenter et de l’administrer. Il a existé sûrement de très bonne heure, pour les divers groupes entre lesquels elle était répartie, des institutions communales ou corporatives, comme il existait à l’origine diverses cours de justice. Les marchands du suburbium, réunis en gildes ou en associations, avaient à leur tête leurs doyens. Les censuales, relevant des différents domaines de la ville, nommaient, soit librement, soit avec l’approbation et sous le contrôle du seigneur, des personnes revêtues d’un certain pouvoir de police. Dans les villes comme à la campagne, il existait des Burrichter, des Heimburgen, etc.[1]. Mais tous ces petits conseils de groupes juxtaposés les uns aux autres n’ont pas formé le conseil urbain. Celui-ci s’est superposé à eux, et une preuve excellente qu’il ne provient pas d’eux, c’est qu’au lieu de les absorber, il les a laissés subsister. On retrouve, en effet, dans beaucoup de localités, des magistrats de quartiers, qui ne sont autre chose que les descendants des administrateurs des anciens groupes locaux. Ils n’ont, pas plus que la gilde, cessé d’exister après la création du conseil. Mais ce qui est vrai de l’une l’est aussi des autres, et le conseil est aussi étranger à la première qu’aux seconds.

Formés par la commune en unité corporative, les bourgeois, solidaires les uns des autres, ont, vis-à-vis les uns des autres, des droits et des devoirs réciproques. En outre, comme université (universitas civium), ils possèdent des privilèges nombreux et ont, d’autre part,

  1. Les voisinages, quartiers, vinaves, Laischaften, etc., que l’on rencontre dans plusieurs villes du moyen âge en possession d’une certaine administration corporative, fonctionnant sous la surveillance du conseil, se rattachent évidemment très souvent à des groupes communaux antérieurs à la formation de la constitution urbaine. Sur ces Specialgemeinden et les questions difficiles qu’elles soulèvent, voy. Liesegang, Die Sondergemeinden Kölns (Bonn, 1885) ; Hœninger, Westdeutsche Zeitschrift, III (1884), p. 60 ; Kruse, Zeitschrift für deutsche Rechtsgeschichte, IX, p. 201 ; Vollbaum, Die Specialgemeinden der Stadt Erfurt (Erfurt, 1881) ; Klippfel, les Paraiges messins (Paris, 1863) ; Kœhne, Der Ursprung der Stadtverfassung in Worms, Speyer und Mainz, p. 78 et suiv. ; von Below, Ursprung, p. 79 et suiv. ; Sohm, Entstehung des Städtewesens, p. 92 ; Philippi, Zur Verfassungsgeschichte der Westphälischen Bischofsstätdten (Osnabrück, 1894).