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Page:Revue maritime et coloniale, tome 18.djvu/463

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et difficiles pour exiger que ses ordres et mes opérations restassent sous le secret ; avec qui aurais-je donc pu, dans cette situation, me comûniquer ? Avant la retraite des plus anciens des conseillers, ils étaient suspects à la Compagnie ; après leur sortie des Isles, il n’y a qu’a examiner quelles étaient la capacité et l’expérience de ceux qui restoient dans le conseil.

Cette première plainte de l’auteur du mémoire insulte moins ma régie, qu’elle ne regarde les ministres, MM. les commissaires du roy, et la Compagnie qui l’ont toujours approuvée : ma cause ne leur est pas étrangère en ce point, d’autant que je ne saurais disconvenir que j’ay été obligé, faute de secours, de conduire presque tout seul les affaires, pendant les années les plus laborieuses, et en même tems les plus heureuses de mon administration. Je prie icy les lecteurs de ne pas prendre l’approbation des premiers supérieurs que je leur cite, d’une manière vague, je leur administreray les preuves ; elles ne comprendront pas une seule année, ni quelques services passagers, mais tout le temps que j’ay eu l’honneur d’être aux ordres de la Compagnie : on apprendra par une de ces lettres que ses intérêts m’ont été toujours plus chers que ma santé, et ma fortune ; que je l’ay toujours aimée, estimée, respectée, que je l’ai vûe toute ma vie des mêmes yeux qu’un enfant regarde sa mère : je lui dois tout, et j’en fais l’aveu toujours avec plaisir ; mais je l’ay toujours servie avec un zèle et un succès qui ont mérité dans tous les tems son approbation et ses éloges ; on en trouvera les preuves, presque dans tous les registres de la correspondance de la Compagnie : après cela puis-je attribuer à une autre cause, qu'àa une prévention décidée et peu instruite, la demande qu’on me fait dans le mémoire, d’être informé de ce que j’ay fait pour le bien de la Compagnie et de l’Isle de France ? On désire, dit-on, de bonne foy d’être éclaircy sur cet article. Mais ceux qui me blâment n’auroient-ils pas signé eux-mêmes les lettres que la Compagnie m’a écrites, pour m’applaudir des plus importants services, que qui que ce soit aye jamais pu lui rendre ?

Je ne m’étendray pas davantage sur cette dernière réflexion, il est tems que je passe à l’histoire de ma vie, pour ne rien laisser désirer à personne.

Je suis entré au service de la Compagnie en l’année 1729, à l’âge de 19 ans ; il y en avait déjà plus de dix qu’elle souhaitait de connoître l’état de son commerce du Sénégal, dont elle ne recevoit que des feuilles volantes pour toutes écritures, ce qui lui laissait ignorer les trois quarts de ses affaires ; cette irrégu-