Aller au contenu

Page:Revue maritime et coloniale, tome 18.djvu/480

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

je croirais l’avoir infiniment bien servie. Je finis en observant qu’il est plus temps que jamais de favoriser ses produits et de se les assurer par des encouragements convenables, surtout en y faisant passer des noirs, ainsi que je viens de le dire. Toutes ses productions, tous ses travaux, tout ce qu’on peut attendre de cette colonie en dépendent uniquement.

Sa sûreté et son agrandissement exigent encore qu’on y envoie des soldats, dont la dépense n’est point telle qu’elle se présente d’abord en ne l’approfondissant pas ; on la trouvera d’une très-médiocre considération, pour peu qu’on la compare à son utilité. L’île de Bourbon, susceptible des mêmes cultures que l’Ile-de-France, a aussi les mêmes besoins ; son fonds est meilleur à quelques égards ; les commodités de la vie y sont plus abondantes et moins chères ; mais l’indolence et la paresse de ses habitants, en général, rendront ses progrès plus lents. Comme elle n’a point de ports, elle est nécessairement moins fréquentée : ce désavantage la tient dans une sorte de solitude, qui semble avoir émoussé l’activité de ses colons pour le travail.

Cette île étant établie depuis longtemps est considérablement plus peuplée[1] que l’Ile-de-France ; elle a fourni beaucoup de secours pendant la dernière guerre, tant en hommes qu’en vivres ; la Compagnie pourra en tirer avec le temps des gens de mer qui lui seront très-précieux. Le produit du café de cette île lui fait un fond capable de couvrir ses dépenses ; pour peu qu’elle ajoute à ce revenu quelques nouvelles cultures, surtout celle du coton, elle se rendra créditrice dans son compte courant avec la Compagnie. »

  1. Cette île qui, en 1784, comptait 7,295, blancs, 777 noirs libres et 34,575 esclaves, n’avait alors, d’après un mémoire de Lozier-Bouvet, daté du 9 mars 1751, que 3,000 blancs et 1,200 nègres. — La population de Bourbon avait souffert beaucoup de la petite vérole, qui, introduite en 1729 par une traite d’indiens, sur le vaisseau que commandait M. de La Garde, sévissait encore en 1743. — La partie de l’Est avait été peu affligée, mais le fléau avait éteint des familles entières, surtout au quartier Saint-Paul. — Suivant le curé Davelu, elle, enleva, dans cette période de temps, plus de 1,500 hommes tant libres qu’esclaves, et un ancien commandant de l’ile, M. Bellier, rappelant ces jours de malheur, faisait remarquer qu’il y avait alors peu d’hommes au-dessous de 5 pieds 6 pouces, et que beaucoup avaient jusqu’à 6 pieds, tous étaient robustes et parfaitement bien faits, écrivait-il en 1750. Les femmes étaient également très-grandes et très-bien faites.