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Page:Revue militaires suisse - 47e année - 1902.djvu/456

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risquera d’être anéanti. En vain objectera-t-on que nos miliciens actuels ne présentent pas un moral bien solide et qu’une panique est à craindre de leur part. Assurément, c’est possible, car tout est possible. Mais telle est la puissance de l’armement existant qu’il suffit d’une poignée de bons tireurs qui ne se laissent pas entraîner par l’affolement, il suffit d’une pièce à tir rapide pour écraser tout un paquet d’hommes.

On est donc en droit de supposer que les échecs se localiseront et même que les trous faits par un adversaire entreprenant dans la ligne de bataille se boucheront d’eux-mêmes, comme se bouchaient les trous faits par les boulets dans les rangs, du temps de la tactique linéaire. Le dressage du commandement et de la troupe devra avoir en vue d’obtenir ce résultat.

Certes, l’histoire montre que, en forçant un point d’une ligne, on peut déterminer toute la ligne à reculer : on l’a vu par exemple, lorsque les mobiles bretons ont abandonné la position de la Tuilerie, à la bataille du Mans. Mais de deux choses l’une : ou l’armée dans laquelle on a fait brèche n’a aucune valeur, et alors elle est condamnée à s’écrouler, ou bien elle a une certaine force de résistance, elle est consciente de son devoir, elle a l’intelligence de sa situation. Alors, si un mouvement rétrograde se dessine par suite d’une circonstance quelconque, ordre mal transmis, démoralisation partielle, manque de munition (je reviens à cette cause, car c’est une de celles qu’il faut le plus redouter, le réapprovisionnement en cartouches devenant impossible sous le feu), l’armée viendra occuper, à quelques centaines de mètres en arrière, une position de repli que le commandement aura fait non seulement étudier, mais encore préparer par les troupes non engagées. En ce cas, toute la ligne se déplacera, ou bien on isolera la portion envahie par une coupure comme celle que pratiquait l’ancienne poliorcétique pour séparer du corps de place un bastion battu en brèche et près de subir l’assaut.

Les comparaisons avec la guerre de siège, je le disais tout à l’heure, s’imposent à quiconque étudie cette conception nouvelle de l’art militaire. On voit l’assaillant cheminer, tracer ses parallèles et les étendre, en cherchant à envelopper le front choisi pour l’attaque.

Il y a pourtant des différences, et qui sont considérables. Le défenseur cerné dans une place épuise ses ressources ;