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LA PÉDAGOGIE FRANÇAISE.

l’école primaire ces vérités que notre siècle a rajeunies, mais qu’il n’a pas découvertes ; que l’esprit français, fidèle à sa mission d’initiateur, avait mises dans le monde depuis Rabelais et Montaigne.

Rabelais et Montaigne, voilà les vrais promoteurs, non qu’ils aient écrit l’un ou l’autre quoi que ce soit qui ressemble à un manuel de pédagogie ; mais tous deux, et chacun selon son allure propre, ont, chemin faisant, ouvert les vues les plus larges, semé les observations les plus fines, les aperçus les plus lumineux. Ils ont remué des idées, et ces idées, pénétrant plus ou moins intimement tous les systèmes d’éducation depuis le xvie siècle jusqu’à nos jours, se sont perpétuées comme par une tradition ininterrompue. Héritier du siècle de la Renaissance, le siècle de Louis XIV offre aux études pédagogiques une mine féconde à exploiter : le mouvement philosophique inauguré par Descartes a son contre-coup dans les doctrines de l’éducation, et la méthode cartésienne convient autant à la logique de l’enseignement qu’aux plus hautes spéculations de la pensée. Des hommes tels que Pascal, Nicole, Arnauld, Bossuet, Fénelon, ne dédaignent pas d’écrire des livres classiques. Mme de Maintenon crée l’éducation publique et laïque, comme on dirait aujourd’hui, pour les filles, tandis que Fénelon publie sur le même sujet son premier chef-d’œuvre ; il n’est pas jusqu’à Mme de Sévigné qui, dans maints endroits de sa correspondance, ne touche à cette question d’une plume rapide, mais singulièrement délicate et sûre. L’abbé Fleury nous introduit dans le xviiie siècle, et nous conduit à Rollin ; je ne dirai pas, Dieu m’en garde ! que Rollin nous conduit à Rousseau : il y a cependant entre l’auteur d’Émile et l’auteur du Traité des Études, comme entre tous les esprits qui ont marqué