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REVUE PÉDAGOGIQUE

relisons, dit-elle (11 janvier 1690), toutes les belles oraisons funèbres de M. de Meaux, de M. l’abbé Fléchier, de M. Mascaron, de Bourdaloue : nous repleurons M. de Turenne, Me de Montausier, M. le Prince, feue Madame, la reine d’Angleterre ; ce sont des chefs-d’œuvre. Il ne faut point dire : Oh ! cela est vieux. Non, cela n’est point vieux, cela est divin. Pauline en serait instruite et ravie. » Elle recommande aussi : « les beaux livres de dévotion » ; car elle ne pouvait s’accommoder de la vulgarité qui règne parfois dans certains de ces livres ; puis elle ajoute : « A l’égard de la morale, je ne voudrais point du tout qu’elle mît son petit nez, ni dans Montaigne, ni dans Charron, ni dans les autres de cette sorte : il est bien matin pour elle. » (11 et 45 janvier 1690.)

Ainsi se poursuivait l’éducation de l’intéressante Pauline, qui cependant avait atteint sa pleine quinzième année. C’était une phase nouvelle. Quinze ans, c’est l’âge des étonnements naïfs, des questions parfois embarrassantes (v. 30 octobre 1689) ou des réponses qui ne le sont pas moins. C’est encore l’âge où on fait sa petite bourse ; on a son argent à soi, on économise, on avaricie sur ses menues dépenses, ses bottines, ses rubans, ses pauvres même quelquefois ; on a dans quelque petit recoin quelques jolies petites pièces neuves, on devient « gardeuse », comme dit Mme de Sévigné (9 août 1689). On trouve des maris provisoires à foison : des oncles, par exemple, ou de vieux amis de la famille. A quinze ans, l’enfant n’est plus une enfant ; sa petite personnalité, qui a commencé d’éclore à six ans, s’est développée ; la timidité et la soumission, conséquences de la faiblesse du premier âge, ne sont plus les mêmes ; on n’est plus une cire molle, on a une empreinte, c’est-à-dire un caractère, un mélange de