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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1879.djvu/17

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REVUE PÉDAGOGIQUE

de verges. La chaussure leur est interdite ; ils n’ont qu’un : seul habit pour toute l’année. Leurs repas sont réglés suivant un régime sévère ; mais si l’appétit de leur corps en croissance n’est pas satisfait, on les encourage à voler le plus possible de fromages sur l’autel de Diane Orthie, saut à les fouetter jusqu’au sang s’ils se laissent surprendre. C'est un apprentissage des ruses de la guerre. Le voleur qui veut faire une capture ne doit-il pas veiller la nuit, imaginer des ruses pendant le jour, placer une embuscade, avoir des gens au guet ? En dressant les enfants à toutes ces manœuvres, le but de Lycurgue était donc évidemment de les rendre plus adroits à se procurer le nécessaire, et plus propres à la guerre. Mais pourquoi, en faisant un mérite du larcin, a-t-il soumis au fouet quiconque est pris sur le fait ? Dans toutes les écoles il y a des châtiments pour ceux qui suivent mal les principes qu’on leur donne. Ce que l’on punit dans les Spartiates, ce n’est pas le vol, c’est la maladresse[1].

Quand ils passent dans la classe des adolescents, au lieu de les abandonner à eux-mêmes, Lycurgue ne fait que leur rendre les exercices plus pénibles, la contrainte plus rigoureuse. Xénophon décrit avec une satisfaction imperturbable l’attitude que doivent contracter les malheureux soumis à ce régime. « Il a ordonné qu’on marchât dans les rues en silence, les mains sous sa robe, sans tourner la tête de côté et d’autre, les yeux toujours fixés devant soi. Il est certain qu’ils ne font pas plus de bruit que des statues ; leurs yeux restent presque immobiles ; enfin ils sont plus modestes que les vierges elles-mêmes dans la chambre nuptiale[2]. » À l’enseignement de la justice que nous

  1. République de Sparte, ch. 2.
  2. Ibid., ch. 3.