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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1879.djvu/18

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LES DOCTRINES PÉDAGOGIQUES DES GRECS.

avons vu tout à l’heure institué chez les Perses, répondent, dans l’éducation spartiate, les combats de vertu. Trois des jeunes gens les plus courageux, nommés par les éphores, se désignent chacun cent compagnons parmi leurs condisciples, en motivant le choix des uns et l’exclusion des autres ; ceux qui sont exclus deviennent les ennemis de cette troupe ; ils se surveillent réciproquement et dénoncent ceux de leurs rivaux qui se livrent à des actions déshonnêtes ; enfin ils se battent partout où ils se rencontrent[1]. C’est donc la délation jointe à la violence. Un dernier trait achèvera de mettre en lumière ce singulier mélange de brutalité et de vertu qui constitue le Spartiate. Lycurgue n’a pas cru suffisante l’autorité du pédonome et des magistrats préposés à l’éducation de la jeunesse ; il a voulu que tout citoyen eût des droits sur chaque enfant, surtout le droit de correction ; et si, frappé par d’autres, l’enfant vient se plaindre auprès de son père, celui-ci est répréhensible lorsqu’il ne lui fait pas subir un nouveau châtiment[2].

Mais Xénophon condamne lui-même sans le savoir cette éducation soumise au despotisme le plus barbare, lorsqu’il écrit ces naïves paroles : « Malgré l’antiquité des lois de Lycurgue, elles ont encore à présent même un air de nouveauté aux yeux des autres nations ; et, ce qui est bien étrange, tandis que tout le monde s’accorde à louer une aussi sublime législation, aucun peuple n’a le courage de l’adopter[3]. » Il la condamne aussi lorsque, oubliant cet idéal inhumain d’une adolescence opprimée, passive et morne, il nous montre dans le jeune Cyrus le plus gracieux

  1. République de Sparte, ch. 4.
  2. Ibid., ch. 6.
  3. Ibid., ch, 10.