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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1879.djvu/246

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LES DOCTRINES PÉDAGOGIQUES DES GRECS.

vieillesse après une vie active et studieuse : elle a plus de sécurité, de richesse, d’expérience, de science ; mais elle les paye par la perte des dons aimables du jeune âge, la gaieté, la légèreté, l’insouciance. Comment l’éducation que nous sommes forcés de donner à nos enfants ne s’en ressentirait-elle pas ? Les affaires avec tous leurs soucis, la vie pratique avec toutes ses nécessités actuelles, les attendent après l’école, et ne leur laisseront plus pour la culture générale de leur esprit que de rares loisirs. Or la somme des connaissances que cette culture exige aujourd’hui, après trente siècles de recherches et de découvertes, est énorme ; plus le temps qu’on lui accorde est restreint, mieux il doit être employé. Aussi les programmes s’étendent-ils chaque jour ; les exigences des maîtres augmentent au point de surcharger et d’accabler l’esprit de l’enfant qui tient à y satisfaire. La simplicité du programme de Platon fait sourire, et en même temps excite l’envie et le regret. Par Les progrès de sa civilisation, l’homme a multiplié les jouissances, mais aussi les besoins de ses sens et de son esprit : il est devenu à certains égards le bourreau de lui-même, « Heauton timorumenos, » et malgré l’affection profonde qu’il leur porte, il n’a pu s’empêcher de faire partager son supplice à ses enfants.

La connaissance de la cité antique nous fera aussi pardonner à la pédagogie de Platon de donner à la famille, dans l’œuvre de l’éducation, une place extrêmement restreinte, pour ne pas dire nulle. L’homme n’y avait le choix ni de ses croyances religieuses, ni de ses opinions, ni même de ses habitudes. « L’État, dit M. Fustel de Coulanges, considérait le corps et l’âme de chaque citoyen comme lui appartenant ; aussi voulait-il façonner ce corps