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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1879.djvu/464

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LES DOCTRINES PÉDAGOGIQUES DES GRECS.

Cependant, si la nature a une telle influence sur le développement physique et moral de l’enfant, elle n’est pas souveraine : l’éducation peut réagir contre elle. L’éducation se compose de l’instruction que l’on reçoit, et des habitudes que l’on contracte. La vertu résulte à la fois de la nature et de l’éducation. « S’il ya défaut sur l’un de ces points, la vertu en est nécessairement incomplète. Sans l’instruction, la nature est aveugle ; sans la nature, l’instruction laisse à désirer ; quant aux habitudes, elles sont défectueuses, séparées du reste. De même qu’en agriculture, il faut rencontrer d’abord une bonne terre, ensuite un laboureur habile, enfin de bonnes semences ; ainsi le naturel de l’enfant ressemble à la terre, celui qui l’élève au laboureur, les règles et les préceptes de la raison qu’il lui transmet à la semence[1]. » Ces distinctions sont tout à fait analogues à celles d’Aristote lorsqu’il définit l’objet de l’éducation, et la comparaison dont se sert Plutarque pour les rendre plus sensibles est la même. Il faut donc qu’avant de donner l’instruction à l’enfant, c’est-à-dire avant de lui faire voir la vérité, on l’ait préparé à cette vue, qui autrement l’offusquerait ; car les préceptes de la morale ne font que choquer celui qui a déjà contracté des habitudes contraires à la morale, tandis qu’il est facile, avant toute leçon, de façonner insensiblement les habitudes par ja pratique, et de leur donner une bonne direction. Ce n’est, suivant Plutarque, qu’une affaire de temps. « Lycurgue, le législateur des Lacédémoniens, avait deux chiens nés des mêmes parents ; l’un fut élevé dans l’oisiveté et dans la gourmandise, l’autre dressé à la chasse. Un jour que ses concitoyens étaient réunis : Hommes de Lacédémone, leur

  1. De Liber, Éduc., édition Tauchnitz, p. 2.