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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1879.djvu/466

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LES DOCTRINES PÉDAGOGIQUES DES GRECS.

les tourner du côté de la vertu, il en sortirait plus d’hommes utiles et honnêtes, moins de vagabonds et de malfaiteurs. Confié à des mains maladroites, l’élève de Fénelon eût promis à la France une sorte de Caligula : on sait ce qu’il était devenu, lorsque la mort le ravit ; son précepteur avait peut-être même trop réagi contre la nature et trop adouci un caractère primitivement féroce. Ce n’est pas, nous l’avons déjà dit dans un autre chapitre, que nous partagions entièrement la noble foi de Plutarque dans les effets de l’éducation. Mais nous pensons que l’activité humaine tantôt s’exagère, tantôt néglige les ressources dont elle dispose. Notre lutte avec la fatalité physique et morale doit être constante et serrée, sans présomption, mais sans défaillance.

La nature n’inspire pas à Plutarque la même défiance qu’à Lucrèce pour ce qui touche l'enfant nouveau-né ; comme Jean-Jacques Rousseau, il veut qu’on écoute ses conseils au début de la vie. Elle nous montre elle-même qu’il faut que les mères nourrissent ceux qu’elles ont enfantés. « Car c’est pour cela qu’à tout animal qui a produit elle fournit le lait comme moyen d’alimentation. Sagement aussi sa providence a donné deux mamelles aux femmes, afin que, si elles ont enfanté deux jumeaux, elles puissent nourrir en même temps l’un et l’autre[1]. »

La science sourit de cette croyance naïve aux causes finales ; mais, par des raisons différentes, elle confirme l’opinion de Plutarque. Le psychologue et le moraliste l’approuveront pleinement quand il dit que les mères nourrissent leurs enfants avec plus d’amour et de sollicitude : car elles les aiment du fond des entrailles, tandis que les nourrices n’ont

  1. De Liber. Educ. p. 6.