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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1882.djvu/635

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petit jardin avec ses deux allées, son petit espalier. Là il vit heureux. « Ma joie n’est pourtant pas sans inquiétude, et la tendresse que j’ai pour mon petit espalier et pour quelques œillets me fait craindre pour eux le froid de la nuit, que je ne sentirais pas sans cela. Il ne manquera rien à mon bonheur, si mon jardin et ma solitude contribuent à me faire songer plus que jamais aux choses du ciel. » La police tracassière, inspirée par j’implacable rancune des jésuites, vint seule troubler encore son repos et ses méditations. En 1732, une dernière et minutieuse perquisition eut lieu dans sa cave et jusque dans son puits, à la recherche d’une presse clandestine.

À la mort de cet homme de bien, le recteur de l’Université ne fut pas autorisé à prononcer son éloge. M. de Boze, secrétaire perpétuel de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, dont Rollin était membre depuis 1701, ne put qu’à grand’peine (ce fut une affaire d’État, dit-il) obtenir de louer l’homme de lettres. Peut-être, outre la raison, bien suffisante d’ailleurs, des haines religieuses, sentait-on instinctivement un adversaire dangereux dans ce modeste et dévoué professeur, absolument étranger à toute agitation politique, mais qui, remarque fort justement M. Demogeot, « par son enthousiasme naïf pour les vertus républicaines, par ces longs et charmants récits des grandes actions de la Grèce et de Rome, était à son insu l’un des ennemis les plus redoutables du gouvernement corrompu qui pesait à la France. »

C’est un lien de plus qui nous attache au bon Rollin : nous en recevrons avec. d’autant plus de sympathie ses directions pédagogiques.