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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1884.djvu/322

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REVUE PÉDAGOGIQUE

moins des plus honorables : c’était celle des Delisle[1], à laquelle on peut rattacher Ph. Buache[2], gendre de Guillaume Delisle. Ce dernier avait, dès 1700, commencé la publication d’un atlas pour rectifier, à l’aide des observations de voyageurs et d’astronomes, les erreurs commises par ses devanciers. Quant à Buache, il attache son nom à un système dont l’influence s’est fait sentir chez nous, dans l’enseignement de la géographie, à peu près jusqu’à nos jours. Partant de l’idée vraie que le relief du sol détermine la pente des eaux et leur direction dans les différents bassins qui les reçoivent, il l’exagérait, en voulant diviser la surface entière du globe en cavités, ou bassins fluviaux et maritimes, que devaient nécessairement délimiter les uns des autres de hautes crêtes montagneuses. La grande ligne de partage des eaux de la Russie lui doit son origine, ainsi que les monts Olonets, et l’arête qui sépare la Loire de la Seine, entre Orléans et Paris. Mais Buache a rendu beaucoup d’autres services, dont il faut lui tenir compte.

Nous ne citerons que pour mémoire un auteur dont nous devons cependant reconnaître le mérite : Nicolle de Lacroix[3], dont la Géographie moderne, pendant plus de cinquante années, fut la seule suivie pour l’enseignement dans les collèges. Mais au-dessus de Delisle, et à côté des Cassini, se place Bourguignon d’Anville[4], qui semble résumer en lui toute la science de son époque, à la fois érudit et cartographe. Il n’a pas exécuté moins de 211 cartes ou plans avec 78 mémoires à l’appui, et son nom jouit encore de la plus haute autorité.

Le dernier venu de cette période si féconde est Gosselin[5], connu par ses travaux sur Ptolémée et Strabon, et qui marque comme la transition entre l’école essentiellement scientifique du xviiie siècle et l’école plutôt littéraire de la première moitié du xixs. En effet, depuis quelque temps déjà s’opérait une grande transformation dans la façon d’entendre l’étude de la géographie. Celle-ci tendait à devenir une question d’érudition pure, où la recherche des textes et des documents primait tout le reste. Nous devons la signaler en passant, pour comprendre la cause même de ce long assoupissement, dans lequel, au dire de M. H. Wagner, tomba chez nous la géographie.

L’opinion du critique allemand peut être contestée et nous essaierons de le montrer. Mais disons-le encore et répétons-le très haut : La géo-

  1. Claude Delisle (1644-1720), auteur d’une Introduction à la géographie. — Guillaume Delisle (1675-1726), disciple de Jacques Cassini. — Joseph-Nicolas Delisle (1686-1768), le maître de Lalande.
  2. Phil. Buache, né à Paris (1700-1773).
  3. Nicolle de Lacroix (1704-1760).
  4. Bourguignon d’Anville, né à Paris (1697-1782).
  5. F.-J. Gosselin, né à Lille (1751-1830).