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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1885.djvu/313

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LES PAYSANS

LES PAYSANS

Pour planter la nouvelle vigne,
Il faut d’abord caver profond,
Mais la terre est dure, et s’indigne
Contre les hommes qui le font :
Elle se défend, la rebelle !
Elle dit qu’elle ne veut pas !
… À coups de pioche, zou, contre elle !
— Les paysans sont des soldats.

C’est l’été, quand le soleil plombe,
Qu’il faut caver, pour faire bien ;
Le pic tombe, et la sueur tombe,
Car la terre ne donne rien !
Ah ! la gueuse ! il faut qu’on la force !
fl lui faut des bras et des cœurs
Pour frapper son cœur sous l’écorce…
Les paysans sont des vainqueurs.

Ils descendent dans la tranchée,
Et s’enterrant jusqu’aux genoux,
Le dos tors, la tête penchée,
Is vont piochant, ceux de chez nous !
Toujours avant, jamais arrière,
À chaque coup, à chaque pas,
Le pic fait fumer la poussière !
— Les paysans sont des soldats.

Si vous croyez que c’est pour rire,
Soupesez leurs outils pesants !
Ah ! la terre pourrait vous dire
S’ils sont braves, nos paysans !
Un seul contre celle en vaut bien quatre,
Et laissez causer les moqueurs,
La conquiert qui sait la combattre !
— Les paysans sont des vainqueurs.

Et quand le « bien », d’un bout à l’autre,
Motte après motte est retourné,
Alors, le « bien » est vraiment nôtre :
Il est conquis, il s’est donné !
Alors, c’est fini la souffrance !
Au beau mitan du champ, là-bas,
On plante le drapeau de France !
— Les paysans sont des soldats.