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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1885.djvu/347

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M. PHILBRICK ET LES INSTITUTEURS AMÉRICAINS


M. John Philbrick, ancien surintendant des écoles de la ville de Boston, vient de faire paraître une courte brochure sur la durée de l’emploi d’instituteur aux États-Unis.

Partant de cette idée qu’en pédagogie la question capitale est, partout et toujours, la question du maître, et que le meilleur critérium d’un système scolaire se trouve dans le caractère et les qualités des maîtres qu’il emploie, il examine, au point de vue de la durée et de la stabilité des fonctions, la situation des instituteurs en Amérique et la compare avec celle des maîtres des autres pays.

Quelle était, dit-il, il y a cinquante ans, aux États-Unis, la situation des employés au service de la nation, de l’État, de la municipalité ? Nos institutions politiques sont fondées sur ce principe que les fonctionnaires publics sont les serviteurs du public et, à ce moment plus qu’à aucun autre de notre histoire, l’opinion dominante était que les fonctionnaires et employés ne devaient avoir aucun intérêt, aucun droit de propriété dans les emplois qu’ils occupaient. De cette opinion vint la pernicieuse habitude qu’on a appelée la « rotation des offices », toutes les fois que la durée des fonctions n’était pas déterminée par la loi. S’appuyant sur ce sentiment général, que l’on considérait alors comme le véritable esprit de la démocratie, le Président Jackson introduisit la coutume de retirer aux fonctionnaires leurs emplois sans se préoccuper des titres qu’avaient pu leur acquérir l’accomplissement de leurs devoirs et leur conduite.

Depuis ce temps il s’est fait un changement considérable dans l’opinion publique. L’idée qui domine aujourd’hui est que la justice pour les serviteurs est essentielle au bon service, et que la justice est incompatible avec un emploi qui ne donne à celui qui l’occupe ni intérêt ni possession assurée.

Appliquant ce principe général au personnel enseignant en particulier, M. Philbrick se propose de soutenir dans sa brochure la théorie suivante : La permanence des emplois d’instituteur les rendrait beaucoup plus désirables. Il ne coûte rien au public d’accorder cette permanence, et pour les maîtres ce serait un bienfait inestimable. La sécurité qu’ils y trouveraient serait pour eux l’équivalent d’un salaire plus élevé, en les affranchissant d’une incertitude qui les décourage et les dégoûte souvent de leurs fonctions. C’est donc pour le public, en premier lieu, une question d’économie. Mais les résultats au point de vue de l’éducation seraient bien plus considérables, car la permanence des fonctions, jointe à une rémunération convenable, est la condition indispensable pour obtenir un corps enseignant réellement capable.

M. Philbrick résume ses idées sur ce point dans les deux paragraphes suivants :

1° Partout et toujours la stabilité d’une situation compte largement, avec le salaire, dans l’estimation des avantages de cette situation,