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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1885.djvu/395

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Nouvelle série. Tome VI.
15 Mai 1885.
N° 5.

REVUE PÉDAGOGIQUE

ÉDUCATION DE LA MÉMOIRE[1].

Importance de la mémoire. — Il n’y a pas lieu de disserter longuement sur l’utilité de la mémoire. Parce qu’on a abusé d’elle autrefois, parce qu’on a eu le tort de lui sacrifier les autres facultés de l’esprit, dans des systèmes d’éducation où l’instruction lui était exclusivement confiée, des pédagogues se sont avisés de la décrier, de la tenir en suspicion, de la traiter presque en ennemie. Ont-ils songé à ce que deviendrait l’éducation sans elle ? Ont-ils considéré qu’il n’est pour ainsi dire pas de moment où l’enseignement puisse se passer de son aide ? Elle enveloppe, elle accompagne les autres facultés ; elle les approvisionne toutes.

« La mémoire, disait Pascal, est nécessaire à toutes les opérations de l’esprit. » — « Sans la mémoire, écrivait Guizot, les plus belles facultés restent inutiles. » La vie morale elle-même, aussi bien que la vie intellectuelle, repose sur la mémoire, et, comme le dit Châteaubriant, « le cœur le plus affectueux perdrait sa tendresse, s’il ne se souvenait plus ».

Sans doute, il n’est plus question aujourd’hui de lui laisser prendre sur l’esprit un empire qui n’appartient qu’au jugement, à la réflexion personnelle. Pour la mémoire, comme pour les autres puissances de l’âme, une culture exclusive est dangereuse. Mais il serait aussi absurde de renier la mémoire, parce qu’on a abusé de la récitation, que d’exclure le raisonnement, parce qu’on a fait trop de syllogismes. Infiniment utile pour tous les usages de la vie pratique, la mémoire est en même temps le plus précieux des instruments pédagogiques. Il n’y a pas de

  1. Cet article est extrait d’un ouvrage qui doit paraître prochainement à la librairie Paul Delaplane, sous ce titre : Cours de pédagogie théorique et pratique.