Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1885.djvu/562

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ainsi la part suffisamment large à l’historique des voyages et à l’analyse des découvertes de son héros, M. Reuss ne perd jamais de vue le vrai but qu’il s’était proposé, celui de faire comprendre, apprécier et aimer la noble personnalité et le grand caractère, l’âme candide et la foi sublime de ce fidèle serviteur de Dieu. Profondément ému lui-même, il fait passer son émotion dans l’âme du lecteur et le laisse plein d’admiration en face d’une vertu qui ne s’est pas démentie un seul jour, à travers les labeurs et les fatigues indicibles, les misères et les dangers sans nombre d’un apostolat de trente ans.

Rien ne serait plus facile que d’appuyer de nombreuses citations ce que nous venons de dire, et de Livingstone lui-même et de son biographe. Nous nous contenterons de transcrire quelques lignes qu’à un des moments les plus critiques de sa vie, un an avant sa réunion providentielle avec Stanley, le missionnaire écrivait sur les feuillets de son carnet de chèques, seul papier dont il disposât dans la misérable hutte du Manyéma où la maladie le tint confiné pendant trois mois. « Je n’ai rien reçu depuis plusieurs années, sauf quelques lettres, vieilles de trois ans, que j’ai trouvées à Oujiji. J’éprouve un désir douloureux d’en finir et j’espère que le Tout-Puissant me permettra de retourner dans mon pays. Mais je me remets aux mains de Celui qui dispose des événements. Si je meurs, je veux tomber en faisant mon devoir, comme un de ses courageux serviteurs. J’ai toujours eu l’assurance que mes amis voudraient me voir faire une œuvre complète et c’est un vœu que je partage en dépit de toutes les difficultés. Mon désir serait de donner à la jeunesse de mon pays l’exemple d’une persévérance virile. »

Il n’a pas été donné à Livingstone de revoir sa patrie et sa famille ; mais ses deux autres vœux ont été amplement exaucés. Il est tombé en faisant son devoir, plus que son devoir, et il a laissé à la jeunesse non seulement de son pays, mais de tous les pays, un exemple éclatant de persévérance héroïque. Cet exemple est bon à méditer, de ce côté de la Manche non moins que chez nos voisins. Remercions donc M. Reuss de l’avoir proposé à la jeunesse française sous une forme capable de l’enflammer d’une émulation généreuse, et terminons par le souhait qu’il se trouve dans ses rangs beaucoup d’imitateurs de Livingstone, capables, sinon de l’égaler, du moins de marcher sur ses traces.


Auguste Himly.


Le livre du soldat français, par le général Championnet, publié par M. Marcellin Pellet, député ; Paris, Quantin, éditeur, 1885 ; 1 vol. in-12 contenant 72 dessins à la plume, avec portraits de Championnet, frontispice, etc. — Le général Championnet est l’un des plus glorieux parmi les soldats de la première République. Parti comme volontaire en 1792, il devint général de brigade en 1793, puis général de division dans l’armée de Sambre-et-Meuse. En 1798