Aller au contenu

Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1887.djvu/207

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
197
LES COLONIES DE VACANCES

Nous causâmes longtemps de ce projet, pour lequel Cottinet s’était assuré de la collaboration de notre maire du neuvième, l’excellent M. Ferry. On commença petitement ; car on n’eut d’abord qu’une assez faible somme à dépenser. Au reste, il n’y a rien de dangereux comme de vouloir, en ses sortes de choses, faire grand au début. Il était certain que l’on ferait des écoles, je veux dire que l’on commettrait des erreurs ; et il est vrai qu’il yen eut de commises, car on ne réussit à rien du premier Coup.

Mais les résultats ne tardèrent pas à montrer combien l’idée était juste en théorie et d’une pratique facile. Vous lirez avec un vif intérêt les rapports que Cottinet a adressés chaque année à son Comité. C’est une chose merveilleuse de voir que de bien il est possible de faire avec peu d’argent.

Ces pauvres petits ! ils avaient passé à l’inspection médicale avant le départ ; ils étaient au retour visités par le médecin. Quel changement ! la poitrine s’était élargie, les joues s’étaient remplies, les muscles fortifiés ; le poids avait augmenté chez tous, bien que les marches constantes eussent dû faire tomber la graisse encombrante, qui boursoufle les membres.

Le corps n’avait pas gagné seul. Il y avait eu — et c’est un point sur lequel la brochure qu vous allez lire n’insiste peut-être pas assez, mais Cottinel m’en a parlé avec admiration — il y avait eu dans l’esprit de beaucoup de ces enfants ce que nos pères appelaient un désemberlucoquement. Ces petits Parisiens, ils n’avaient jamais rien vu que le chemin qui mène de leur rue à l’école ; l’horizon de leurs pensées était borné à cet étroit espace. On s’imagine que le gamin parisien connaît Paris. Quelques-uns sans doute ont vagabondé à travers la grande ville. C’est le petit nombre. La plupart sont en quelque façon serfs du logis que leur père habite, et hors duquel il n’a pas le loisir de les promener. Cottinet en a vu qui, à l’âge de douze ans, passant dans le Palais-Royal, demandaient ce que c’était, et s’émerveillaient à regarder le Louvre, dont ils n’avaient pas même entendu parler.

À plus forte raison ne savaient-ils rien de la campagne. Ils étaient sur ce point d’une ignorance crasse, et n’auraient pas distingué un champ de blé d’un champ d’avoine. Les premiers jours