Aller au contenu

Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1887.djvu/349

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
339
PROTECTION DE L’ENFANCE

se suffire à eux-mêmes. Quant aux enfants plus âgés qui vivent abandonnés sur la voie publique et n’ont d’autres moyens de vivre que le vol ou la mendicité, la société ns leur offrait d’autre asile que les dépôts où la compagnie des pires criminels achevait de les corrompre, et que les maisons de correction où, enfermés jusqu’à leur majorité, ils subissaient une expiation d’autant plus longue qu’ils s’y étaient exposés plus jeunes et moins responsables.

Il faut reconnaître que cet état de choses n’avait pas pour unique motif la fiction d’après laquelle les enfants de plus de douze ans étaient en état de se suffire à eux-mêmes. C’est la loi qui oppose à la charité publique les obstacles les plus sérieux. En effet, ces enfants ont presque toujours une famille qui, bien souvent, les pousse dans le vice et tire ainsi d’eux le plus clair de ses revenus. Qu’on essaie de tirer du bourbier ces petits malheureux et, trop souvent, un père, armé de l’autorité que lui donne la loi, viendra réclamer le gagne-pain qu’on lui enlève ou voudra se faire payer la permission de faire du bien à ses enfants.

Et puis, quelle difficulté de réformer des enfants, presque des adolescents, que tant de mauvaises influences ont contribué à corrompre ? N’était-il pas à craindre que les lieux où l’on réunirait ceux de ces petits malheureux qu’on aurait pu enlever à leurs familles ne devinssent de nouveaux foyers de corruption ?

L’Angleterre, fort en retard sur la France au point de vue des institutions protectrices de la première enfance, nous avait devancés dans la protection de ces enfants errants qu’elle désigne par le terme pittoresque d’« Arab boys ». Mais, chez elle, le législateur était venu en aide au philanthrope : une loi de 1866 permet à tout citoyen. lorsqu’il rencontre un enfant de moins de quatorze ans vagabondant dans les rues, de le conduire devant le juge qui décide, sans se soucier davantage de l’autorité paternelle, s’il y a lieu d’envoyer l’enfant dans une « école industrielle et de réforme ».

Les Anglais ont en effet organisé tout un système d’écoles spécialement destinées à ces petits vagabonds. Ils y reçoivent une instruction professionnelle et, plus tard, le « Local Government Board » favorise l’émigration de ces « petits Arabes » au Canada.

Les résultats de cette organisation ont été des plus rapides. On a constaté que les délits de l’enfance étaient tombés, de 13,981 en 1856.

à 9,300 en 1866 :

à 7,000 en 1876 ;

et à 5,700 en 1882.

Si nous devons envier à l’Angleterre la munificence avec laquelle la charité privée a doté les écoles de « petits Arabes », nous avons adopté pour eux un système d’éducation qui semble supérieur à bien des points de vue à celui des écoles anglaises. On a imaginé en France d’étendre aux petits vagabonds le système qui donnait pour les enfants trouvés d’excellents résultats : on les place dans des