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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1890.djvu/221

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L’INSTRUCTION PUBLIQUE
DANS LA RÉPUBLIQUE ARGENTINE

On a parlé avec tant de faveur en France dans ces derniers temps de la République Argentine et en particulier de ses progrès scolaires, qu’aussitôt après avoir reçu le dernier rapport présenté au Congrès National par le ministre de l’instruction publique, j’ai cru que les lecteurs de la Revue pédagogique accueilleraient, avec la bienveillance habituelle aux Français, quelques renseignements nouveaux sur l’état de l’éducation dans un pays qui semble appelé par ses richesses naturelles, par l’étendue de son territoire, aussi bien que par ses institutions libérales, à réaliser au sud du Grand Continent découvert par Colomb les mêmes merveilles que tout le monde admire dans les États-Unis de l’Amérique du Nord.

Ce qui suffirait déjà à donner quelque vraisemblance à cette espérance, c’est le courant d’immigration qui s’y dirige, et qui a atteint, l’an dernier, le chiffre énorme de trois cent mille personnes. Souhaitons en tous cas que notre supposition devienne une réalité : car alors il restera prouvé que la race latine, qui peuple déjà et continue à peupler presque exclusivement cette immense et fertile contrée, est aussi capable de mener à bonne fin la pratique du self-governement que la race anglo-saxonne, bien que la première ait été élevée à l’école de l’absolutisme et de l’Inquisition, tandis que la seconde a grandi dans les principes de la liberté de conscience, qui est la source de toutes les libertés.

Sans me faire illusion sur les difficultés d’accomplissement d’un pareil rêve, je crois que si, aux facilités matérielles d’existence dont on jouit actuellement à un si haut degré dans la République Argentine, on parvient à joindre un bon système d’éducation, — et par là je n’entends pas seulement l’éducation qui tend à former des êtres robustes, des esprits vigoureux et des caractères forts, mais encore celle qui développe les aptitudes techniques de tous les individus, — je crois, dis-je, et j’espère que les destinées de mon pays brilleront d’un plus vif éclat encore que le flambeau de liberté, de richesse et de science allumé par le grand peuple