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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1890.djvu/222

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REVUE PÉDAGOGIQUE

des États-Unis au nord du Continent américain et dont le rayonnement éclaire le monde. Je dis plus : peut-être même verra-t-on l’étoile resplendissante du Nord pâlir devant l’éclat de la Croix du Sud. Alors il sera démontré que les pôles sur lesquels tourne le monde moral sont l’intelligence et le sentiment, ce qui est le « problème auguste » dont parle le poète argentin.

Ce qui est dès à présent certain, c’est que, au sud du continent américain, on voit se former et se développer rapidement un peuple nouveau, au sein duquel viennent se niveler, s’amalgamer des races et des croyances, différentes de celles qui prédominent au nord du même continent ; et c’est là pour tous les penseurs de la terre, et surtout pour ceux de race latine, un champ fécond de méditation et d’étude.

Tels sont les motifs qui m’ont décidé à écrire cet article, motifs auxquels s’ajoute la bienveillance que nous a déjà témoignée la Revue pédagogique, qui, à propos de l’Exposition des écoles de Buenos-Aires et des belles photographies de ses bâtiments scolaires exhibées au pavillon du Champ de Mars, a bien voulu entretenir ses lecteurs de nos progrès. Je désire que sa lecture assure de nouvelles sympathies à un pays qui ne marchande pas les sacrifices aux œuvres d’instruction.

Et, avant tout, quelques mots d’histoire.

Ce qu’on appelle aujourd’hui la République Argentine, aussi bien que le reste de l’Amérique du Sud et l’Amérique centrale, à l’exception du Brésil, est resté sous le joug de l’Espagne jusqu’aux premières années de ce siècle. Quelque temps après avoir proclamé son indépendance, la République tomba sous une tyrannie brutale qui se prolongea pendant une vingtaine d’années. Ce ne fut qu’en 1853, après la chute du dictateur Rosas, qu’elle parvint à se donner la constitution libérale qui la régit actuellement, avec les réformes partielles qui y ont été apportées en 1860.

A partir de cette époque, jusqu’en 1880, date de la dernière guerre civile, dont le résultat fut la fédéralisation de la ville de Buenos-Aires, érigée en capitale de la République, on a vu se succéder trois périodes présidentielles, de six années chacune, celle du général Mitre, celle de Sarmiento et celle du docteur Avellaneda. Ensuite sont venus le général Roca, et le docteur Juarez, qui est le président actuel et dont les pouvoirs cesseront en 1892.