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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1892.djvu/141

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L’ENSEIGNEMENT CHEZ LES INDIGÈNES MUSULMANS D’ALGÉRIE

notions élémentaires mais précises de science européenne. Ce ne sera pas l’assimilation, car celle-ci ne sera peut-être pas réalisable avant des siècles ; ce sera tout au moins le rapprochement des deux races dans des idées communes et dans des intérêts communs. Il est un mot heureux de Bugeaud qu’on a eu raison de citer à la tribune du Sénat : il disait que la vraie colonisation doit se faire, à la fois, par la colonisation française et par la colonisation des indigènes. D’une part, implantons solidement la face française en Afrique, tâchons d’y établir le plus que nous pourrons de nos compatriotes : c’est le moyen le plus direct et le plus sûr. Mais ne négligeons pas l’autre : travaillons à ce que ces Kabyles et même ces Arabes nous vaillent un jour des colons. Sachons utiliser leur travail, leur intelligence comme leur ardeur guerrière. Faisons-leur connaître une France juste, bienfaisante, autant que glorieuse ; et puisqu’il n’existe ni de patrie berbère ni de patrie arabe, montrons-leur une patrie dans la nôtre.

P. S. — J’ai eu l’honneur de présenter au lecteur Mlle Fatma Valentine, monitrice indigène à Azrou-Kola, et de faire pressentir son prochain mariage avec un de ses compatriotes et collègues du corps enseignant. Le lecteur lira sans doute avec intérêt une lettre publiée dans la République Française du 12 janvier 1892, qui nous renseigne sur les suites de ce mariage. Il y trouvera la confirmation de ce qui a été dit plus haut sur la force des coutumes kabyles et les difficultés que nous rencontrons dans l’œuvre uniquement de l’émancipation de la femme berbère. Ces difficultés ne sont pas imputables aux indigènes.

Voici la lettre en question :

Monsieur le directeur,

Au printemps dernier, j’ai inspecté plusieurs écoles de Kabylie. Chacun sait, depuis le beau rapport de M. Burdeau, combien elles sont intéressantes, ces pauvres écoles perdues au fond des montagnes du Djurjura. Aucune ne m’avait plus vivement frappé que la petite école enfantine d’Azrou-Kola.

Je revois d’ici, à l’entrée du village, au bord d’un abîme de verdure, au delà d’une enceinte grossière de larges dalles, une maison modeste, fruste, rustique, une ancienne mosquée. À l’intérieur, une salle unique,