Aller au contenu

Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1906.djvu/350

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

institué par un sophiste ès lettres latines… » Descartes dira, au xviie siècle : « La bonne institution sert beaucoup pour corriger les défauts de la naissance ». Et La Chalotais au xviiie : « Si l’humanité est susceptible d’un certain point de perfection, c’est par l’institution qu’elle peut y arriver ».

C’est seulement depuis la Révolution que le mot d’instituteur est devenu officiel. Il ne pouvait l’être plus tôt : car le maître de jadis n’était pas réellement un éducateur, au sens pédagogique du mot. Son rôle se bornait à enseigner machinalement le catéchisme, la civilité, la lecture, l’écriture, un peu de calcul. L’explication du catéchisme, d’où l’éducation morale était censée découler, revenait au prêtre. La partie la plus noble comme la plus délicate de nos fonctions lui échappait. Aussi le désignait-on communément par les termes de maître d’école ou de magister, de régent, de recteur, d’écrivain ou de clerc. Encore ce dernier mot se rapportait-il surtout à ses fonctions à l’église paroissiale ; cela est si vrai que le xixe siècle ayant dédoublé l’instituteur-sacristain, le nom de clerc, en Normandie, est resté pour désigner l’employé du culte. La mention de clerc sur les anciens registres des fabriques n’implique donc pas nécessairement l’existence d’une école dans le village ; elle peut se rapporter exclusivement à des fonctions de chantre ou de sonneur de cloches.

Le Nord, et plus spécialement la Flandre, les diocèses de Reims et de Saint-Quentin, avaient leurs coutres, coustres ou custodes. Dans son Histoire de Roubaix, M. Leuridan donne la liste des coutres de cette ville depuis le milieu du xve siècle ; ils étaient chargés d’instruire la jeunesse et jouissaient d’une maison dite de la coutrerie sur un fonds appartenant à l’église, comme en Normandie les clercs jouissaient de la maison cléricale, ailleurs les régents ou recteurs de la maison rectorale.

Pour la première fois, nous rencontrons le mot d’instituteur dans les statuts synodaux publiés en 1697 par l’évêque d’Amiens : « Nous défendons à toutes personnes de remplir les fonctions d’instituteurs ou d’institutrices sans que nous les ayons examinées sur leur religion, leurs mœurs et leur capacité ». Condorcet lui donna entrée dans la langue officielle par son Rapport à l’Assemblée Législative des 20-21 avril 1792.