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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1906.djvu/360

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REVUE PÉDAGOGIQUE

en gros et petit caractère, et à l’unanimité, il est investi de la régence des écoles pour 90 l., prix habituel[1].

Nous retrouvons les mêmes concours entre magisters dans d’autres parties de la France. Tantôt, la commission d’examen est composée du conseil tout entier des paroissiens ou chefs de famille, tantôt de quelques notables, tantôt du curé seul. Dans le premier cas, l’élection du magister se faisait à la pluralité des suffrages, en présence d’un officier public qui en dressait acte. Le spectacle devait être curieux de ces paysans, la plupart illettrés, jugeant de la capacité de ceux qui devaient instruire leurs enfants. Quant aux candidats, leur habileté était de s’ingénier, par l’exhibition de tous les talents possibles, à gagner les suffrages des villageois. L’un s’engage « à enseigner la jeunesse à lire, à écrire, à jouer du luth, de la mandore et autres perfections », pendant que sa femme instruira les petites filles « en plusieurs poincts d’esguille et principalement en nuances[2] ». En 1763, à Auxerre, Philippe Thibout, arithméticien, et sa femme, prêtent serment, le mari de bien enseigner l’écriture, l’arithmétique et la danse, la femme la lecture aux enfants[3].

L’examen n’était guère plus sérieux quand l’assemblée déléguait quelques-uns de ses membres pour interroger le candidat, À Fontenay-le-Fleury, en 1714, le jury se compose du curé escorté de douze notables dont sept déclarent ne savoir écrire ni signer. À Brétigny (Seine-et-Oise), 27 chefs de famille sur 120 environ se réunissent en l’étude du notaire pour nommer un maître ; ce sont eux « la plus grande et saine partie des habitants » : 13 seulement savent signer. Il nous serait facile de multiplier ces exemples.

Comme toute élection qui se respecte, celle du magister pouvait devenir l’occasion de profondes divisions dans la paroisse.

  1. Note transmise au Musée pédagogique en 1879, par l’inspecteur primaire de Sisteron, et reproduite par R. Rey, ouvrage cité. — En Béarn, l’examen se passait partie à l’église, partie à la maison commune. À Louvie-Juzon, 1684, l’assemblée « … lou a feit entrar à l’églcise, feit légir et cantar, et ensuite esten rentratz en l’assemblade, lou auren feit escriber et feit far chiffres… » (Sérurier, L’instruction primaire en Béarn, p. 39-40).
  2. Rameau, L’instruction primaire à Mâcon avant 1789, in Revue de la Société littéraire de Mâcon, juillet-août 1873.
  3. Dictionnaire de pédagogie, t. I, p. 274.