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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1906.djvu/362

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REVUE PÉDAGOGIQUE

ment conscience de son rôle : les doléances présentées en 1789 par les instituteurs de Bourgogne en sont une preuve éclatante[1].

Baux et contrats. — Les obligations réciproques du maître d’école et des paroissiens étaient consacrées par un bail ou contrat, passé devant notaire et valable soit pour un an, soit pour 3, 6 ou 9, ou jusqu’à résiliation de l’une des parties. A Paris, le chantre n’accordait de lettres de provisions que pour un an ; chaque maître ou maîtresse devait rendre sa permission au synode, sans pouvoir résigner sa fonction en faveur de qui que ce fût[2].

Les contrats annuels étaient particulièrement préjudiciables à la stabilité des maîtres et par suite à la prospérité des écoles. Dans la subdélégation de Saint-Mihiel, c’était une « navette continuelle ». Le contrat, il est vrai, pouvait être renouvelé en faveur du même titulaire, mais chaque réélection était l’occasion de sollicitations de toute nature. « Le maître d’école, dit le curé d’Uguy, en Lorraine, est obligé de se présenter à la communauté tous les ans, deux mois avant la Saint-Jean. Et tous les ans on fait un nouveau traité. Pour l’obtenir, ce sont des cabales, des flatteries et souvent des buvettes pour apaiser les mauvais et les mécontents ». « Le maître d’école, dit un autre curé, paye vin et eau-de-vie, se réconcilie par là avec la communauté, et recommence tous les ans à nouveaux frais[3]. » Le fait était si fréquent que l’évêque de Toul, par un mandement du 7 avril 1717, déclara indignes et incapables de l’emploi de maîtres d’école ceux qui useraient de brigues, buvettes et autres mauvaises pratiques.

On ne buvait pas moins au pays de la pomme où les ligues antialcooliques n’’existaient pas davantage. Il était d’usage que le maître payât sa bienvenue aux habitants sous forme de copieuses rasades d’eau-de-vie, et l’on trouvait cela très naturel ! Tel ce « chétif maître d’école » du Tilleul, près d’Étretat, appréhendé par les employés des aides pour avoir consommé, en vingt-trois jours, 37 pots d’eau-de-vie ! Le subdélégué du Havre le

  1. Voir Albert Duruy, L’instruction publique et la Révolution, p. 371-372.
  2. Cf. Joly, Traité historique des écoles épiscopales et ecclésiastiques pour les droits des chantres, chancelliers, etc., p. 283.
  3. Matthieu, L’ancien régime dans la province de Lorraine et Barrots ; Schmidt, ouvr. cité.