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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1909.djvu/43

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LA RÉFORME DE L’ENSEIGNEMENT DU DESSIN

On a dit d’abord que la méthode nouvelle, en voulant s’appuyer sur la personnalité de l’enfant, bâtissait dans le vide, se condamnait à rester comme en l’air : car « la personnalité existe très peu chez les enfants ». C’est une objection d’ordre psychologique ; c’est une question de fait. Il se peut qu’elle ne soit pas encore complètement tranchée. Pourtant il nous semble bien que, pour la plupart, les observateurs de l’âme enfantine sont disposés à trouver en elle les marques d’une personnalité, sinon très forte, du moins nettement distincte. Sans doute, si l’on donne au mot de personnalité le sens de volonté, de caractère, il n’en peut être question chez les enfants ; mais ils ont des instincts, des goûts qui sont propres à leur âge ; c’est là précisément ce dont la méthode nouvelle a affaire, ce qu’elle prétend stimuler, diriger, former, faisant en cela, d’ailleurs, le même office que les autres disciplines.

D’autres accordent que la personnalité existe bien chez l’enfant, mais ils contestent qu’il faille s’appliquer à la développer : car, on est ainsi conduit, disent-ils, à mettre l’enseignement individuel à la place de l’enseignement général, à faire prévaloir la fantaisie sur la règle, à tomber en plein dans l’anarchie. Ceux-là, ce sont les autoritaires : Eugène Guillaume naguère avait très clairement exprimé le fond de leur pensée, quand il disait : « N’est-ce pas un danger de faire appel à l’initiative et à l’indépendance, quand il ne conviendrait que d’ordonner et de discipliner les esprits ? » Pour répondre à cela, il faudrait ici reprendre tous les arguments qui ont été allégués dans le débat général entre la pédagogie d’autorité et la pédagogie libérale. Nous n’avons ni assez d’espace ni assez de loisir pour essayer rien de pareil. Qu’il nous suffise de faire remarquer que, depuis déjà longtemps, les éducateurs autoritaires ont été contraints de battre en retraite sur presque tous les points, que de plus en plus la pédagogie moderne s’inspire de l’idée de Montaigne, disant que le bon maître ne doit pas tenir son élève en bride, mais le faire trotter devant lui pour juger de son train. Ajoutons qu’entre l’ordre et la liberté l’antagonisme n’est peut-être pas aussi irréductible que les esprits tranchants se plaisent à le prétendre, et remarquons de plus que les promoteurs de la nouvelle méthode, tout en s’inspirant surtout de la liberté, ne lui ont pas